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[détox] De l’actualité en série(s) avec Les Jours

Episode #5 de notre série [détox] avec un dernier numéro consacré aux médias alternatifs sur internet. Et pour bien commencer le weekend, on dit “Bonjour les Jours !”.

Prolonger l’actualité

Les Jours fait partie de ces nouveaux sites d’information qui ont choisi de fonctionner sans publicité. Il y a un peu plus d’un an, quelques anciens journalistes de Libération ont ressenti le besoin de proposer un journalisme différent. Un média qui resterait proche de l’actualité mais qui ne se contenterait pas de passer d’une brève à l’autre. Un média qui continuerait à traiter des sujet que d’autres ont parfois laissé de côté. Si vous lisez régulièrement la rubrique [détox], vous pensez peut-être à L’imprévu. S’il y ressemble par certains aspects, Les Jours se démarque principalement par sa façon de traiter l’actualité et de publier de façon quotidienne.

“Pure Player”, le site reprend à sa façon une des plus grosses tendances audiovisuelle de ces dernières années : les séries. Tout comme les séries, Les Jours proposent des histoires de façon continue dont le nombre d’épisodes n’est pas arrêté au départ. Le média feuilletonne ainsi l’actualité sous forme « d’obsessions ». Ces obsessions sont donc toujours en lien avec l’actualité mais permettent de creuser là où d’autres médias ne sont pas allés : “l’idée, c’est de continuer l’actualité quand les autres n’en parlent plus” précise Raphaël Garrigos, l’un des fondateurs des Jours. “Cette volonté de vouloir prolonger cette actualité est finalement venue de notre frustration, en tant que lecteurs, de voir un fait important ne plus du tout apparaître dans la presse”.

Une presse exigeante qui approfondit et fait de la place aux idées

Tout comme leur modèle télévisuel, ces séries accrochent le lecteur, lui donnent envie de connaître la suite, ou au contraire ne l’intéressent pas et il est alors libre de zapper et d’aller consulter une autre obsessions. Par exemple, j’ai beaucoup apprécié les obsessions La fête du stream sur l’industrie musicale et L’Empire, qui traite de l’acquisition de Canal + par Vincent Bolloré, au point de guetter tous les jours la sortie d’un nouvel épisode. En revanche, je n’ai parfois pas jeté de coup d’œil aux autres séries d’articles.

Quelques obsessions

Ce mode de fonctionnement par obsessions permet au lecteur de se sentir libre dans le choix des sujets qui l’intéressent plutôt que de se focaliser seulement sur une thématique générale, comme la politique ou l’économie.

Les rubriques classiques n’ont plus de sens sur internet

“Les obsessions sont nées du constat que les rubriques classiques n’ont plus de sens sur internet. Elles sont issues du papier, et l’actualité d’aujourd’hui est plus difficile à ranger dans des cases. De plus, les obsessions n’ont pas forcément pour objectif de durer, une fois qu’on a fini de traiter un sujet on clôt l’obsession. Tout le contraire des rubriques classiques qui sont, elles, figées.”  renchérit Raphaël. “On définit des obsessions en lien avec l’actualité. Par contre, on ne prévoit pas de durée définie”. Autrement dit, tant que l’actualité s’y prête la série continue. “C’est ce qu’on va appeler le deep média. À l’inverse du slow média, qui a pour principe de s’éloigner des brèves pour traiter des sujets dont on ne parle pas, le deep média reste attaché à l’actualité et de la continuer. On n’est pas spécialement dans la lenteur, mais dans la profondeur”. Contrairement donc à un site comme Le Quatre Heures qui va proposer des histoires longues de façon mensuelle, Les Jours reste au cœur de l’information et publie de façon quotidienne, voire plusieurs fois par jour.

Les récits sont ainsi développés sur la longueur, et chaque épisode invite le lecteur à suivre le quotidien d’un certain nombre de personnes.

Le site met l’accent sur la photographie

Actuellement, le site propose une dizaine d’obsessions. On retrouve par exemple toute une série d’articles dédiée au 13 novembre, qui compte déjà 36 épisodes. Si les principaux sites d’information ont cessé de parler de cet événement tragique une quinzaine de jours après les attentats, ou alors se contentaient de donner des nouvelles lorsque l’enquête avançait, Les Jours ont continué de traiter le sujet.

L’obsession Treize Novembre

Version pilote et abonnement

Concernant le design, le site mise beaucoup sur la sobriété et le confort de lecture. Il fait aussi la part belle aux photos et le travail sur les montages est visuellement original et, à mon sens, très réussi. Le site précise d’ailleurs son goût pour l’image : “Pour raconter des histoires, des lieux, des personnages, il faut des images” et privilégier “une photographie indépendante, originale, porteuse de sens et… faite maison”.

Toujours dans la mise en page, j’apprécie beaucoup les icônes et informations complémentaires sur la droite des articles, qui permettent de comprendre en quelques lignes qui est la personne citée dans l’article ou d’écouter un extrait d’interview. Une manière subtile d’amener un complément d’information sans casser la lecture.

Le site vit grâce aux abonnements, qui sont l’unique source de revenus. “Cela nous garantit une certaine indépendance par rapport aux sujets que nous couvrons, mais ça nous permet aussi d’offrir une expérience de lecture beaucoup plus intéressante. On ne veut absolument pas de publicité, on veut vivre de nos lecteurs”. Pour atteindre l’équilibre budgétaire dans trois ans, l’équipe s’est fixée un objectif de 25 000 abonnés.

Pour l’instant, Les Jours est en version pilote et propose donc une offre découverte de 1 euro par mois. Une fois en version définitive, l’abonnement est de 9 euros par mois en tarif normal, ou de 5 euros en tarif réduit. Une preuve supplémentaire qu’après l’ère du “tout gratuit” sur Internet, les lecteurs exigeants sont prêts à payer si la qualité est au rendez-vous. Cela a fonctionné pour la vidéo à la demande avec Netflix ou avec la musique avec Deezer et Spotify et c’est un modèle à prendre en compte pour la presse.

L’équipe des Jours

En parallèle, Les Jours part à la chasse aux investissements. Après une première campagne de crowdfunding, le site se lance aujourd’hui dans une campagne de crowdequity en proposant à ses lecteurs de devenir actionnaires du média, dont le ticket d’entrée minimum est de 1000 euros.

“Les Jours cherchent 750 000 euros. Si un industriel fait un chèque de ce montant, il s’achète un média et de l’influence politique. Si 750 personnes font un chèque de 1 000 euros, elles cofinancent un média indépendant”. C’est ce qu’expliquait l’économiste Julia Cagé, auteure de « Sauver les médias : capitalisme, financement participatif et démocratie », lors de la présentation du site pilote des Jours.

Après ces quelques épisodes consacrés aux nouveaux médias d’information, avec entre-temps une petite pause culturelle, nous ferons un petit tour du côté de la pop culture le temps de deux ou trois articles.

À dans 15 jours !

>> Retrouvez les précédents numéros de notre série [detox]

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Par : Opera
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