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[Journée de la Femme] Face à la menace émergente des SLAPP*, RAIDH lance un appel aux internautes et aux blogueurs, par Sabine Coulon

Article écrit par Sabine Coulon[1] pour Presse-citron à l’occasion de la Journée de la Femme. Dans le cadre de la préparation d’une campagne de protection des…

Article écrit par Sabine Coulon[1] pour Presse-citron à l’occasion de la Journée de la Femme.

Dans le cadre de la préparation d’une campagne de protection des individus, associations et ONG menacés dans leur liberté d’expression par certaines entreprises privées, le Réseau d’alerte et d’intervention pour les droits de l’Homme (RAIDH) lance un appel aux internautes et aux blogueurs.

Les SLAPP*, menaces à la liberté d’expression

Le terme SLAPP, Strategic Lawsuit Against Public Participation, signifie en français « poursuite stratégique contre la mobilisation citoyenne ». Ce terme concerne aussi bien les poursuites judiciaires effectives que les simples menaces de poursuites, émises par une entreprise à l’encontre d’individus ou de groupements d’individus ayant critiqué leurs services, leurs produits, leur gouvernance ou encore leur communication. L’objectif d’un SLAPP, ou encore « poursuite-bâillon », est de mettre fin à un débat public défavorable à l’entreprise en muselant ses participants.

Dans les cas où la menace ne suffit pas à faire plier le citoyen, la bataille juridique qui a lieu a tout d’un combat de David contre Goliath, puisque les individus, associations ou ONG sont contraints de mobiliser leurs ressources financières et humaines pour leur défense, dans des procès longs et coûteux face à des entreprises financièrement solides.

Pratique connue en Amérique du Nord, plus de 20 états ont une loi anti-SLAPP aux Etats-Unis. Au Canada, la prise de conscience de l’existence des SLAPP a ouvert un débat public depuis quelques années, sans donner lieu à une loi spécifique jusqu’à aujourd’hui.

Le cas Oprah Winfrey est un exemple typique de SLAPP : alors que l’épidémie de vache folle sévissait au Royaume-Uni, l’animatrice de télévision a exprimé à l’antenne ses inquiétudes quant à la sûreté du bœuf produit aux États-Unis. Le groupement d’éleveurs Texas Beef Group a alors engagé des poursuites et réclamé à Oprah des dommages-intérêts. En France des procédures judiciaires semblables ont vu les victoires de l’association Greenpeace contre Areva (au bout de 6 ans de procès), et d’Act-up contre la société Abott, qui a abandonné une plainte quelques mois après l’avoir déposée.

Face aux SLAPP, RAIDH prépare une campagne de protection de la liberté d’expression

Suite à la campagne « NON au Taser » orchestrée par RAIDH, SMP technologies TASER France a poursuivi l’association pour dépassement des limites de la liberté d’expression et dénigrement des produits Taser. L’entreprise, qui réclamait à l’association plus de 60 000 €, a été condamnée à verser 2000 € de frais d’avocat à l’association. Acquitté en première instance, RAIDH estime aujourd’hui subir l’acharnement de TASER qui a fait appel du jugement.

Dans ce contexte, RAIDH s’interroge sur l’émergence en France de la pratique des poursuites-bâillons par des entreprises qui détournent la fonction judiciaire pour défendre leur intérêt privé. Son président, Fabrice Ferrier, dit s’inquiéter « de ce qui semble constituer une menace majeure du droit à la liberté d’expression et au débat public », et veut « disposer d’un panorama des pratiques à l’oeuvre et dresser un état des menaces que ces pratiques font peser sur nos libertés fondamentales ». Aujourd’hui rien en France ni en Europe ne vient réguler ces pratiques qui sembleraient se multiplier.

RAIDH prépare actuellement une campagne de protection de la liberté d’expression des individus, associations et ONG. Afin d’y parvenir RAIDH veut dans un premier temps alerter l’opinion publique sur l’existence et les dangers de telles pratiques, et faire un état des lieux des SLAPP en France. L’objectif est de parvenir à protéger le tissu associatif et la démocratie citoyenne en apportant une réponse à ce phénomène dans le contexte français ,pour éviter que le système judiciaire ne soit perverti par ces pratiques.

« Internautes et blogueurs, aidez-nous à identifier ces pratiques »

Sensibilisé aux pressions dont les blogueurs peuvent faire l’objet, Fabrice Ferrier leur lance un appel : « Aidez-nous à identifier et dénoncer cette instrumentalisation de la justice : si vous avez été victime de ce type de pratique, qu’il s’agisse de poursuites ou de menaces -qui sont beaucoup plus insidieuses mais qui ont le même effet de bâillon- sur des articles que vous auriez écrit dénonçant un produit quelconque, si vous avez reçu un rappel à l’ordre de l’entreprise en question, dites-le nous. Cela nous permettra d’identifier l’amplitude du phénomène et sa réalité. »

Les internautes non-blogueurs sont invités, quant à eux, à relayer l’information : « Aidez-nous en nous faisant part des décisions de justice ou articles de presse mentionnant l’action entreprises privées à l’encontre d’ONG et mouvements sociaux pour défendre leurs intérêts privés. »

Pour contacter RAIDH, rendez vous sur la page contact de leur site. L’association garantit l’anonymat des personnes qui le souhaitent sur simple demande.

Une consultation sera lancée prochainement via un formulaire en ligne sur le site de RAIDH : www.raidh.org. Destinée principalement aux associations et ONG, elle sera aussi ouverte aux individus.


[1] Sabine Coulon est Chef de projet et éditrice Web.
Son blog : http://goodgirls.fr/

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Par : Opera
5 commentaires
5 commentaires
  1. Très intéressant.
    Drôle de problème que de trouver un juste milieu entre le “on peut dire n’importe quoi” et le “tu vas morfler si t’as pas 10 000 euros pour organiser ta défense”.
    Je note ça dans les tablettes. 🙂

  2. Excellent, je n’avais jamais entendu parler du terme SLAPP… Je crains qu’il ne devienne courant dans la langue française vu la menace de la chose sur ce qui nous reste de liberté d’expression !!

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