Article écrit par Lucie Piriou[1] pour Presse-citron à l’occasion de la Journée de la Femme.
Blackout. Soudain, les lumières éclatent, irradient jusqu’au néant, et le noir complet s’installe. Silence. Consternation. Puis les yeux s’habituent à l’obscurité et certaines silhouettes hagardes se lèvent, incrédules, les mains tendues vers le pôle technique, le disjoncteur, la vie.
J’ai le réflexe de mettre à jour mon statut Facebook mais le Web ne répond plus et je secoue une souris morte devant un écran noir.
J’ouvre mon tiroir, et je récupère un cahier neuf, qui ira très bien avec mon bic mâché. Une stratégie à écrire, à mettre en forme, peut aussi bien se faire par écrit – Et c’est plein d’une ardeur nouvelle que je m’attelle à la tâche.
Les premiers signes se dessinent, arabesques inachevées, en paquets gris sur les carrés délavés. J’assiste ébahie à la naissance de l’écriture, loin de la Mésopotamie, avec ses caractères tremblants qui dégoulinent. Ma main molle s’écrase avec application sur le papier sali, je fais baver l’encre du stylo, j’ai 2 ans et on vient de m’offrir mon premier feutre – Je n’arrive pas à tenir le crayon avec mes mains pleines de doigts malhabiles.
Intérieur, extérieur, j’inspecte mes deux pouces préhenseurs qui n’ont pas fait de gymnastique depuis les bancs de l’université, ces deux doigts inutiles qui ne servent qu’à frapper l’espace.
Je suis l’étrange organisme qui a décidé d’aller visiter la terre alors que la vie était océane. Je suis l’homme sans mémoire qui découvre son visage. Je suis celui qui se rassure en caressant son clavier et qui débranché, n’est bon qu’à jeter.
Je suis la deuxième partie de moi-même, la personnalité obscure, enfouie au fond de l’âme humaine, le côté sombre et primaire, l’homme qui s’empare d’un fusain et gribouille les murs, je suis Goethe à la lumière vacillante d’une chandelle, Vivaldi au fond de son église se piquant aux croches et se faisant une ligne de clés de sol – La lumière se rallume, mon ordinateur cligne des yeux, je twitte mon malheur et j’oublie que j’aurais voulu être un artiste.
[1] Lucie Piriou est Community Manager au sein de la régie publicitaire BlogBang, blogueuse, et outre quelques prédispositions pour la photographie, montre un talent certain pour l’écriture.
Son blog : http://www.acquatofana.fr/
Elle a par ailleurs déjà été mise en examen chez Presse-citron.
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Sympa l’article 🙂
Sinon c’est quand déjà la journée de l’Homme ?
Belle plume!
@rootsgeeks, la journée de l’homme c’est tout le reste de l’année :D, on pouvait pas leur laisser plus d’une journée non plus faut pas déconner :p
@ Gabriel , ok mais précise Homme Riche / matcho , mais pour moi qui est pauvre et respectueux … y a rien ? sniff
( sinon sympa ton site Gabriel … je joue aussi du trad’ va sur http://www.zarpada.fr si tu veux écouter )
bises @ vous
Content de te voir ici Lucie 🙂
J’applaudis! J’applaudis en particulier sur ce passage là :
“Je suis la deuxième partie de moi-même, la personnalité obscure, enfouie au fond de l’âme humaine, le côté sombre et primaire, l’homme qui s’empare d’un fusain et gribouille les murs.”
Superbe!
Et drôle de coïncidence! Je suis juste en train d’écrire l’histoire d’une fille (c’était au temps pre-twibook) qui peignait sur les murs de Lascaux!