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[rédacteur invité] Pourquoi Facebook est contraint de brader ses tarifs publicitaires

Article rédigé par Jean-Nicolas Reyt, de reyt.net[1] Surfer sur les réseaux sociaux comme Facebook est devenu la première activité des internautes (23% de leur temps en…

Article rédigé par Jean-Nicolas Reyt, de reyt.net[1]

Surfer sur les réseaux sociaux comme Facebook est devenu la première activité des internautes (23% de leur temps en ligne) [2], devant les jeux sociaux (10%), la lecture d’e-mails (8%) et la consultation de portails (4%). Réseaux sociaux et jeux sociaux combinés, les activités communautaires occupent donc en moyenne un tiers du temps de connexion des internautes.

Quelles sont les conséquences de cette croissance des activités communautaires sur les revenus publicitaires des réseaux sociaux? Les sites communautaires ont généré 1.40 milliard de dollars de recettes publicitaires aux Etats-Unis en 2009, selon une récente étude Emarketer. Si ces chiffres donnent le vertige, ils ne représentent pourtant que 6.7% de la totalité des budgets publicitaires en ligne.

C’est ici que se situe le paradoxe des médias sociaux. Si un tiers du temps des internautes est dédié aux activités communautaires, comment expliquer que ces plateformes captent moins de 7% des budgets publicitaires internet? Si les médias sociaux ouvrent de nouveaux canaux de communication, pourquoi les annonceurs n’en profitent-ils pas?

La grande braderie des publicités Facebook

Si les réseaux sociaux n’attirent qu’une fraction des budgets publicitaires, ce n’est pas faute d’afficher des bandeaux. Facebook a pris la tête des plateformes publicitaires aux Etats-Unis au premier trimestre 2010 en affichant 176 millions de publicités display, selon une récente étude. Avec 16.2% de parts de marché, le réseau social devance largement Yahoo (12.1%), Microsoft (5.5%) et AOL (2.9%).


Source : eMarketer

Google, qui concentre sa stratégie sur la publicité contextuelle, ne représente que 2.4% du marché du display aux Etats-Unis. A combien ont été vendues les 176 millions de publicités affichées au premier trimestre aux Etats-Unis? Les études menées sur le sujet démontrent que Facebook doit brader ses espaces publicitaires pour attirer les annonceurs.

Avec 0.56 dollars en moyenne de CPM (coût pour mille affichages), Facebook facture ses annonceurs quatre fois moins cher que le reste d’internet où le CPM moyen est de 2.52 dollars. En France, afficher 1000 bandeaux publicitaires sur Facebook ne coûte que 0.14 dollars en moyenne, soit 18 fois moins qu’ailleurs sur internet. Les prix pratiqués par Facebook sont si bas qu’on estime que le réseau social à lui seul fait chuter le CPM moyen sur tout internet de 18%.

Les piètres performances des campagnes publicitaires sur Facebook

Deux raisons pourraient expliquer que Facebook soit obligé de brader les prix de ses espaces publicitaires. Soit les prix sont mécaniquement bas parce que le réseau social met sur le marché trop d’espaces par rapport à la demande,  soit les annonceurs exigent des prix plus bas parce que les publicités sont sur Facebook sont moins efficaces qu’ailleurs sur internet.

Comparer le CTR (click-through rate, taux de clic) moyen sur Facebook avec celui des autres plateformes publicitaires est édifiant. Google, par exemple, estime qu’un un annonceur débutant peut espérer avoir un taux de clic de 2% en moyenne sur sa plateforme. En clair, en affichant la même publicité 100 fois, on peut espérer que 2 internautes cliquent dessus et se rendent sur le site de l’annonceur. D’autres experts estiment que le CTR moyen sur Google fluctue entre 2% à 5% selon la compétitivité du marché.

Le CTR moyen sur Facebook, quant à lui, est évalué entre 0.01% et 0.05% [3]. En clair: pour une publicité affichée 1 million de fois, Google apportera 20.000 visiteurs à l’annonceur, tandis que Facebook seulement 200. Pour fournir le même trafic à un annonceur, Facebook doit donc afficher en moyenne 100 fois plus les publicités que Google. On imagine l’impact sur les recettes publicitaires du réseau social.

Le règne du search marketing

En France, le search marketing représente le premier poste de dépense des annonceurs sur internet avec 430 millions d’euros de budgets en 2009. Le secteur du search marketing a cru de 8% par rapport à 2008. Le display,quant à lui, ne représente en France que 260 millions d’euros, l’e-mailing 52 millions, et la publicité mobile 13 millions. Comment expliquer cette domination du search marketing sur le marché publicitaire en ligne?

Sur les moteurs comme Google, les internautes sont en recherche active d’information (achat de produits, comparaison de services, etc). Les annonceurs peuvent donc cibler les internautes de façon contextuelle. Une publicité pour un site de voiture ne sera affichée qu’aux internautes cherchant le mot « voiture », par exemple. Les internautes en recherche active sur un sujet précis étant plus susceptibles d’être intéressés par une publicité ciblée, le taux de clic est plus élevé.

Sur Facebook, la situation est inverse. A défaut de chercher quoique ce soit, les membres du réseau social alimentent principalement leurs profils et interagissent entre eux. Comme Facebook n’est pas utilisé comme un outil de recherche, le seul ciblage que le réseau social peut proposer aux annonceurs se fait sur des critères géographiques et démographiques. Aussi fins que soient ces critères, proposer de vendre un produit ou un service à quelqu’un qui ne cherche rien a peu de chance d’aboutir à un clic ou à une vente.

La difficulté d’attirer les annonceurs sur Facebook

Sur Google, les internautes en mode « recherche » sont plus réceptifs aux offres que sur Facebook où ils sont en mode « loisir ». La raison de cette grande braderie est donc la piètre efficacité des campagnes publicitaires sur Facebook. Que l’annonceur choisisse de faire une campagne au Coût Pour Mille ou au Coût Par Clic, les taux de clics restent trop bas pour représenter un canal publicitaire intéressant.

D’autres raisons additionnelles peuvent être évoquées pour expliquer la difficulté pour Facebook d’attirer les annonceurs sur sa plateforme. Tout d’abord, les responsables marketing restent habitués à annoncer sur des médias internet plus traditionnels. 65% annoncent même trouver difficile de suivre les évolutions des réseaux sociaux, ce qui expliquerait leurs réticences à allouer un budgets à ce canal.

Ensuite, Facebook a essuyé plusieurs tsunamis médiatiques ces derniers mois, suite à l’érosion des paramètres de confidentialité notamment ou à l’apparition du bouton “Like”, véritable petit mouchard numérique. Ces scandales abondamment relayés par la presse ne contribuent pas à faire naitre de la confiance chez les annonceurs, qui passeront leur chemin par méfiance.

En conclusion

Malgré les centaines de millions de publicités affichées, Facebook n’a pas réussi pour l’instant à développer un modèle publicitaire satisfaisant. Avec le bouton “Like”, Facebook ambitionnerait-il de lancer son propre moteur de recherche communautaire, alimenté par ses membres, afin de capter une partie des budgets de search marketing?

[1] Jean-Nicolas Reyt est chercheur universitaire et consultant en e-marketing. Il est l’auteur du Guide du Web Management (Editions Dunod). Vous pouvez le retrouver sur twitter http://twitter.com/jnreyt ainsi que sur son blog http://reyt.net.

[2] Ces chiffres, issus d’une étude Nielsen aux Etats-Unis, sont corroborés par le dernier rapport européen de l‘OFCOM.

[3] Ces chiffres correspondent aux témoignages de différents annonceurs sur Facebook (exemples iciiciici et ici)

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Par : Facebook, Inc.
3.7 / 5
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34 commentaires
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  1. “Surfer sur les réseaux sociaux”: Mettre à jour/commenter des albums, des statuts et autres messages publics “sûrement intéressant” pour ceux qui les ont écrits+ Jeux sociaux +Mails: N’est-ce pas la même chose ?
    La différence entre un message FB et un mail : le mail peut parfois contenir des trucs sérieux.

    Pour en revenir à l’article, il ne faudrait pas oublier que Google a fait son business sur la pub contextualisée, dont Pertinente. Ce que FB a du mal à réussir : trouver de la pertinence et de la valeur sémantique dans ses supports.
    Comme les annonceurs ne s’intéressent qu’aux résultats (clics), il est tout à fait normal que FB intervienne sur le facteur Traffic que sur Pertinence.
    ( Clic=Traffic x Pertinence).
    Je pense que les tarifs pub FB tendront encore vers le bas quand les annonceurs appréhenderont mieux l’outil et analyseront les premiers résultats.
    Réponse probable de FB : Plus de traffic, plus de traffic, … quand tous les autres sites fermeront, les annonceurs viendront chez nous ! [J’aime]

  2. Continuer a vouloir se focaliser sur le cout par click est moyenageux
    Aucun ROI est iniquement d obtenir des clicks
    Ce qui est important c est comment ces clicks se transforment suivant le ROI attedu de l Entreprise: leads, Ventes …
    Mon experience montre que si on ce concentre sur les couts pat leads vente … Bref sur les vrais resultants de ROI (return of investment) facebook est loin d être aussi mauvaos que voids suggerer
    Ce dictat

  3. article tres complet et tres interressant…
    j’avais bien entendu que la pub sur FB etait moins, vous venez de m’en donner la raison…

  4. Merci beaucoup pour cet article, très riche.

    En revanche, la comparaison de la publicité sur Facebook avec celle sur Google ne peut s’établir qu’à la lumière de l’usage qu’ont les internautes de deux sites.

    Comme le souligne très justement l’auteur, l’internaute se rend sur Google pour effectuer des recherches alors qu’il utilise Facebook à des fins majoritairement sociales et ludiques.

    Partant de ce constat, il serait intéressant de compléter ce billet et de comparer l’efficacité de la publicité sur Facebook à celle constatée sur d’autres sites similaires, du moins en termes d’usages.

    N’étant pas du tout experte sur la question, j’en appelle à vos connaissances !

    Efficacité des publicités sur des sites de divertissement VS. efficacité des publicités sur Facebook : des réponses ?

    Merci d’avance.

  5. Je pense que l’intérêt pour les marques, dans un contexte de navigation “loisir” est l’amélioration de l’image / notoriété.
    La publicité dans Facebook n’a alors lieu d’être, que pour promouvoir une opération de marque, sur le même circuit.
    À savoir : une marque monte une opé sur sa page, et en fait la promotion ciblée auprès du public qu’elle vise. Le taux de clic est supérieur, la marque ne cherche pas à vendre, mais à proposer du “loisir 2.0”, et retire des bénéfices en termes d’images, principalement.

  6. N’oublions pas qu’énormément d’argent est dépensé par les annonceurs sur Facebook via : mise en place, suivi, modération de fan page et application.

    Pour le moment Facebook, ne fait pas payer la création de fan page ou application, mais cela va changer!

    Quand on regarde le ROI que peut rapporter une fan page, aucun annonceur n’hésitera à payer pour le maintien de sa page! Et ce, même si le montant se chiffre en milliers d’euros.

    Facebook est loin d’avoir dit son dernier moi, croyez-moi!

  7. Il y a quand même un intérêt au pubs Facebook qui n’existe pas chez Google, c’est le ciblage par géolocalisation précise et surtout par “profil”.
    Exemple : paramètrer l’affichage de l’annonce pour les habitant d’une ville précise (ça existe aussi dans GG) mais seulement aux femmes de 20/40 ans, ça c’est une spécificité de FB.

  8. En ligne avec certains commentaires précédents, si la problématique soulevée est bonne (différence entre poids des supports et investissements pub) cet article illustre très bien le dilemme infernal du web : faire du media performant, immédiatement. Obtenir un clic, un lead une vente, tout de suite. Sauf à remettre un siècle de publicité totalement en question, force est de constater que tant que l’on aura pas trouver de “nouveaux” (vieux comme la pub en fait) modèles de performance (mémorisation par exemple), les sites dits “medias” ne s’en sortiront pas. La plus grande force du web est aussi sa plus grande faiblesse : le tout mesurable, et la mise sur le même niveau de toutes les sources de trafic. Comment comparer le résultat d’une recherche, à l’exposition à une publicité avec les mêmes metrics ? le bon sens nous dit que c’est incomparable…

  9. Génial cet article – j’adore le style, le contenu, les prises de position. Bref Jean-Nicolas revenez nous vite ! 🙂

    J’aurais bien mis une comparaison à Twitter (Gowalla, 4sq, …) qui introduisent eux aussi un tout nouveau canal publicitaire – centré sur l’instant et l’hyper géolocalisation. Donc au final pareil que Google, de la pub “contextuelle”, mais sans recherche initiale. Facebook n’a pas cette notion de contexte et n’arrive qu’à proposer des pubs générales et plus fades…

  10. Il est même frappant de constater que facebook n’attire pas les grands annonceurs. La plupart des publicités concernent des produits marginaux.

  11. Bonjour,

    Merci pour cet article. On parle à un moment donné de Google Display, puis de Google. Si l’on compare les CTR Facebook avec Google Display pour être à périmètre égale, alors Google n’atteint pas 2 à 5 % de CTR du tout. Mais 0,01% à 0,5% en fonction des sites, volumétrie, cible etc.

    Au final, il faut replacer le client et ses objectifs au centre de la stratégie média. Peu importe le CTR ou le CPC, si l’annonceur y trouve son compte. Facebook apparait pour certains comme un complément au mix média online déjà établi. D’autres comparent le média aux autres canaux d’acquisitions. D’autres l’utilisent dans un objectif purement display, ou acceptent une dégradation du ROI pour l’apport display qu’il représente.

    D’expérience, en fonction de la typologie de l’annonceur, de son activité, il est possible de mener sur Facebook des campagnes publicitaires 100% ROIste et obtenir des coûts d’acquisition aussi compétitifs que sur Google, le moteur ! Tout comme il est possible de mener des campagnes ROIstes compétitives sur le réseau Google Display. La vraie question est de savoir si ca peut s’inscrire dans la durée.

  12. La qualité des annonceurs n’est pas terrible sur Facebook, peut être que les grands annonceurs ne trouvent pas leur clientèle dans facebook.

  13. Merci pour cet article très intéressant.
    Il me semble qu’annoncer sur facebook ne doit pas être envisager dans un processus bannières-click-vente, nous sommes vraiment sur de l’image et les bannières ne devraient intervenir qu’en complément d’une page fan animée comme il se doit. Ceci pourrait améliorer les ctr sur Google (et les autres support on-line, voir sur les achats en point de vente) d’un annonceur.
    La mesurabilité des résultats ne devrait pas être envisagée support VS support mais plan global 1 VS plan global 2, ainsi nous serions vraiment si une présence dans les réseau sociaux et pertinente. Qu’en pensez-vous?
    D’autre part, auriez vous des chiffres sur les nouveaux formats proposés par FB dit d’engagement (+ ou – 5€ CPM) qui ne sont affichés qu’en homepage et propose des vidéos, des évènements,…
    qui me semblent bien plus performants en terme de CPC?

  14. Le Ctr sur Facebook est genéralement proche du taux de clics involontaire.Ca se voit clairement quand on regarde le CR issue de ces clics ,qui est souvent a 0.

  15. Ayant testé la pub pour Kizz TV sur Facebook, je partage pleinement cette analyse, et les chiffres qu’elle donne : sur Facebook j’ai qussi constaté un CTR est incroyablement bas, malgré un filtrage socio-démographique fin, de sorte que finalement le CPC se retrouve nettement supérieur à celui de Google mais pour un volume de clics ridicule.

    Aucun intérêt donc à ce stade, et cela permet de nourrir de sérieuses inquiétudes sur la pérennité à long terme de Facebook….

    En revanche Yahoo! et Bing sont intéressants : il amènent 10% seulement du volume amené par Google, mais avec un CPC inférieur de moitié, et donc pour 5% de l’investiissement fait sur Google : on en viendrait donc à souhaiter que la PDM de ces 2 concurrents augmente 🙂

  16. Un fait important, 50% des clics provenant de FB ne génèrent pas de visites. LEs outils de tracking ne mesurent pas tous à cause des modifications d’URL imposées par FB.

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