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Test Beyond : Two Souls

Les acteurs Ellen Page et Willem Dafoe sont à l’affiche du tout nouveau jeu signé Quantic Dream. Beyond : Two Souls se situe bien à mi-chemin entre le cinéma et le jeu vidéo. Pari réussi pour cette grosse production réservée à la PS3 ?

Avec un certain David Cage toujours aux commandes, le studio français Quantic Dream nous livre son nouveau jeu vidéo intitulé “Beyond : Two Souls” qui succède à “Heavy Rain” sorti en 2010.

Comme dans Heavy Rain justement, c’est à une expérience qui transcende le jeu vidéo qu’on est invité à se prêter.
Afin de plonger dans le scénario autour duquel tout le jeu est bâti, les développeurs ont fait appel à deux acteurs renommés pour de longues séances de motion capture.

Un réalisme qu’on retrouve donc dans les personnages emprunts de gravité mais également dans l’aspect cinématique du jeu. La PS3 est ici une nouvelle fois poussée dans ses derniers retranchements après The Last of Us plus tôt dans l’année. Tout juste peut-on noter çà et là quelques baisses de framerate.

L’histoire

Dans Beyond : Two Souls, vous prenez le contrôle de Jodie Holmes, elle-même incarnée par Ellen Page, à différents stades de sa vie (de 8 à 23 ans), le tout étant distillé sous forme de flashbacks.

A tour de rôle fillette, adolescente et jeune femme suivant les parties du jeu, Jodie n’a rien du commun des mortels. Elle est en effet habitée par une entité dénommée Aiden qui la protège mais la handicape dans ses relations sociales. Cette présence capable de réactions violentes est au centre du jeu et des questions que le joueur est amené à se poser. En somme, Aiden est à la fois la force et la faiblesse de Jodie.

Nous n’en dirons pas plus afin de ne pas spoiler. Tout juste peut-on ajouter que Jodie a noué une relation particulière avec Nathan Drawkins (c’est Willem Dafoe qui “l’interprète”), scientifique payé par le gouvernement pour l’étudier. L’homme est tiraillé entre ses obligations professionnelles et son attachement à Jodie.

Tout a été fait pour fluidifier au maximum l’expérience. Si le jeu a cet aspect cinématique, il n’intègre pas réellement de cinématiques pour ne pas hacher le déroulement. On reste ainsi captif de cette histoire de bout en bout sans interruption.

Quid de l’impact du joueur sur les événements à venir ?

La présence de flashbacks est d’emblée le point qui interroge dans le jeu. Alors que dans Heavy Rain, il s’agissait d’emprunter différentes voies au gré du jeu, il est ici bien difficile de mesurer l’impact des choix (4 possibilités de réponse) dans Beyond : Two Souls construit différemment de manière non chronologique.

On retrouve bien ici les choix parfois cornéliens déjà présents dans Heavy Rain, toute l’astuce ou la frustration (c’est au choix) provenant du fait qu’on s’interroge sur l’impact (sur l’histoire, sur la vie de Jodie et des autres personnages) découlant de ces choix. Ont-ils d’ailleurs réellement un impact sur la trame du jeu ? La question se pose de la même manière pour la réussite ou non de certains passages (affrontements, objectifs…).

La réponse tombe comme un couperet : si vous échouez dans certains objectifs et suivant vos choix, la tournure sera différente avec à la clef 23 fins différentes selon David Cage. Toujours est-il que cela n’est pas systématique : échouer dans certains combats ne semble pas avoir de conséquence. Tout cela reste donc confus et il faudrait y jouer de multiples fois pour en avoir le coeur net.

Mais, le but de ces différents embranchements qu’on peut suivre n’est pas d’apporter une replay value au jeu, mais plutôt de vous investir émotionnellement dans l’histoire par vos choix (“vais-je sauter de ce pont ?”, “dois-je me venger ?”, “dois-je utiliser ce couteau ?”, “dois-je voler cet argent ?”…).

Mise en scène et construction

Petite fille timide, Jodie se forge un caractère au fil du jeu. La construction sous forme de flashbacks permet de mieux comprendre le cheminement de l’héroïne.

Si l’ensemble paraît complétement décousu et déstructuré de prime abord, le puzzle se reconstitue inéluctablement au fil du jeu.

On ne peut que féliciter les développeurs pour la mise en scène. Comme au cinéma, l’usage des différents plans a parfaitement été étudié.

On note aussi que certains éléments présents dans le jeu s’opposent parfois d’un niveau à l’autre : à l’extrême froid de l’hiver enneigé répond la chaleur accablante du désert d’Arizona, face à Aiden existe une entité plus sombre…

L’ensemble est bercé par une bande sonore magistrale (avec un passage vocal et accompagnement à la guitare acoustique qui ne laissent pas de marbre) qui contribue indéniablement à créer cette ambiance. Les graphismes de très haute volée son à l’avenant : les détails sur la peau, les visages et la qualité des textures (neige, feu…) sont ainsi bluffants. De plus, les décors regorgent de détails. Les animations des personnages sont du même acabit.

Gameplay

On contrôle Jodie à l’aide des deux sticks analogiques : stick gauche pour la déplacer et stick droit pour la caméra. Mais Jodie peut également faire appel à Aiden pour l’aider : triangle pour sortir du corps de Jodie et manipulation simultanée de la gâchette gauche L1 ainsi que des deux sticks.

Suivant les mouvements effectués avec ces derniers, on peut déplacer, interagir avec le décor (projeter un objet, appuyer sur un interrupteur, ouvrir une porte de l’extérieur…), prendre possession d’un individu, connaître les dernières pensées d’un mort, créer une bulle protectrice ou encore étrangler un individu. Aiden, qui est à l’écran relié à Jodie via un flux d’énergie jouant le rôle de fil d’Ariane, peut se déplacer à travers les murs et c’est souvent en éclaireur qu’on fera appel à ses services.

Un gameplay plutôt simple mais efficace qui va permettre tour à tour d’explorer, d’accomplir les gestes du quotidien, de fuir, de se battre, de détourner l’attention…

Un discret point blanc apparaissant à l’écran signale que Jodie peut interagir avec son environnement (ouvrir une porte, préparer à manger, prendre une douche…) en dirigeant le stick droit vers celui-ci.

Des scènes de QTE (Quick Time Event) sont également présentes afin d’enchaîner des mouvements, d’escalader, de combattre (en accompagnant ou en esquivant les coups alors que l’action est ralentie), de franchir des obstacles (en passant dessous ou dessus suivant leur hauteur), de monter à cheval…. un classique dans un jeu signé Quantic Dream même s’ils ont ici été modifiés (appuis prolongés et simultanés jusqu’à 4 touches). Cette manière de porter les coups et d’esquiver lors des combats n’est pas une réussite : durant certains passages sombres, on a souvent du mal à distinguer les éléments permettant d’opter pour la bonne direction au stick.

Mais, l’objectif est finalement ailleurs que dans la réussite des différents challenges distillés çà et là. Tout est en fait prétexte à l’immersion, à vous faire ressentir l’action… Le pari est réussi de ce côté avec une escalade dans l’intensité du jeu, le tout étant saupoudré de temps plus lents et calmes comme pour mieux préparer les phases où l’adrénaline coule à flots…

Mais l’élément de gameplay le plus intéressant est probablement lié à Aiden. Cette présence fantomatique, qui ne peut être vue des autres, peut interagir avec certains éléments du décor ou des individus (marqués par des points bleus). Tout cela reste bien entendu dirigiste puisqu’on ne peut donc pas interagir avec tout l’environnement. Il n’en reste pas moins qu’on ressent un sentiment de toute-puissance et une forme d’impunité lorsqu’on prend les commandes d’Aiden. Venir venger Jodie lorsqu’elle a été mal menée est un vrai petit plaisir coupable.

On retrouve l’aspect dirigiste avec le mouvement de la caméra qui, en certaines occasions, ne permet pas d’observer à 360 degrés. C’est plutôt frustrant.

De l’innocence à la frayeur en passant par la tendresse

Au gré des différents chapitres, on se surprend à ressentir une multitude d’émotions et des sentiments contrastés envers les personnages : empathie pour Jodie, voire pour Aiden, méfiance  dans un premier temps vis-à-vis de Nathan Drawkins, amitié pour Cole (l’assistant de Nathan), peur, sentiment de haine et de vengeance (il ne faut pas chercher d’ennuis à Jodie dans un bar), toute puissance, sentiment amoureux, tendresse (pour Tuesday par exemple et autres compagnons d’infortune d’un moment), compassion…

Des sentiments à profusion et un kaléidoscope de personnages haut en couleur font de cette quête initiatique bien plus qu’un simple jeu vidéo et bien plus qu’un film.

La tentation est grande de décrire des passages du jeu pour partager l’émotion ressentie (âmes sensibles s’abstenir) à certaines occasions. Mais ce serait au détriment de l’histoire, sachant que le jeu repose sur la découverte de celle-ci.

Bonus

Dans le jeu, on peut accéder à des Artworks et autres vidéos bonus (making of..) comme le Blu-ray d’un film (autre clin d’oeil au cinéma).

Notons également qu’une appli nommée “Beyond Touch” est disponible gratuitement sur les stores d’Android et d’iOS. Elle permet de jouer depuis l’écran tactile de son terminal tactile plutôt qu’avec le dualshock. On peut aussi jouer en coop avec un contrôleur et une personne derrière son écran tactile.

Conclusion

Beyond : Two Souls sera sur les étals à compter du 9 octobre 2013. Un quatrième jeu vidéo signé Quantic Dream qui ne laissera pas indifférent. Les fans de scoring auront forcément bon ton de tirer à boulet rouge sur B2S tant il est singulier dans ce qu’il propose. Des choix assumés par un David Cage qui réitère sa volonté de dispenser plus d’humanité et de sentiments dans le jeu vidéo. L’objectif est plus que réussi et il est bien difficile d’abandonner Jodie après plusieurs heures passées en sa compagnie. Un paradoxe quand on connaît l’histoire de cette héroïne malgré elle dont on suit avec délice les épisodes qui ont marqué sa jeune existence. On se réjouira également que le personnage principal soit féminin ; c’est suffisamment rare pour être noté.

On pourra toutefois reprocher à ce thriller d’action psychologique de distiller les différentes parties du jeu comme les épisodes d’une série. Toutefois, c’est la manière dont l’histoire est construite qui veut cela. Reste que la nébuleuse qui entoure les multiples fins possibles est probablement la plus grande faiblesse du jeu. Tel choix ou telle action ont-ils un impact sur la suite à ce moment précis du jeu ? C’est malheureusement une question qu’on se pose fréquemment.

Malgré tout cela, nous vous recommandons chaudement Beyond : Two Souls édité par Sony et disponible exclusivement sur PlayStation 3. L’expérience est unique et envoûtante.

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7 commentaires
7 commentaires
  1. Toutes mes félicitations à Renald pour la description de ce test superbement bien rédigé, argumenté, raconté, etc. Je tenais en tant que “vieux” gamers saluer ce travail qui sent bon la maturité vidéo-ludique digne d’un certain Marcus (…sur l’écriture). Il y a des talents qui passent parfois inaperçu mais là Rénale, bravo à toi ! J’ai hâte de suivre tes prochains tests. 😉

  2. @Flam696 , merci beaucoup. Ca fait plaisir de lire un tel commentaire et donne encore plus envie de vous faire partager ma passion pour les jeux vidéo.
    Quant à Beyond Two Souls, j’ai tellement passé un excellent moment à y jouer que je voulais vraiment partager mes sensations. Je sais pertinemment que beaucoup diront que j’ai été trop dithyrambique sur les qualités de B2S et que ce jeu va diviser. Mais j’assume pleinement ce que j’ai écrit. Ce qui compte pour moi avant tout, c’est vraiment l’expérience de jeu.

    J’aime aussi qu’un studio de développement sorte des sentiers battus, prenne des risques et ne se contente pas simplement d’incrémenter le titre de “1” chaque année à sa franchise.

    Je vous promets d’autres tests de jeux passionnants à venir (dont un très bientôt qui vaut également le détour) et plus d’indé.

  3. Je rejoins Flam696, c’est un article très bien rédigé, bravo ! J’aime quand les tests sont rédigés sans jargon, clairement et sans gaminerie comme j’ai pu déjà lire dans des sites spécialisés français.

    J’ai vraiment envie de découvrir ce jeu et de lire d’autres tests. Moi aussi j’aime quand un studio sort des sentiers battus, qu’il ai vraiment envie de nous faire découvrir une oeuvre, de nous immerger, ça donne une meilleure images des jeux vidéos 🙂 .

  4. Bel article sur Beyond Two souls. Pour ma part j’ai téléchargé la démo et franchement je ne sais pas si je dois considérer ce jeu comme un jeu vidéo… On est vraiment beaucoup spectateur des scènes, le gameplay ? Il n’y en a pas, zéro. Et je trouve que les choix ne sont pas assez accentués comme “décisif”, on l’impression que peu importe ce qu’on décide de faire, ça aura les mêmes répercutions sur le scénario, contrairement au jeu d’aventure Walking Dead qui préciser à chaque fois que l’action que l’on va mener va être décisive et changer l’histoire. Dommage

    1. @Gauth76 , tu mets effectivement le doigt sur la faiblesse du jeu. Je sui par ailleurs ravi que l’article t’ait plu.

      Concernant B2S, c’est dommage qu’il y ait ce problème lié aux choix. Mais, je salue les choix “courageux” qui ont été faits par David Cage et son équipe. Et au final, quelques soient les faiblesses du jeu, on passe un super moment (trop court d’ailleurs) et c’est l’essentiel au final.

      Par ailleurs,je trouve que Sony a super bien joué le coup en 2013 avec des exclusivités vraiment différentes du reste de la production actuelle : The Last of Us, Puppeteer, Rain et donc B2S. De quoi attirer les joueurs vers les consoles de la marque et donc vers la PS4.

      Avais-tu joué à Heavy Rain ?

  5. Merci Renald (et Syborg).
    😉
    (Whouaaouu… 5 jours déjà passé, j’ai pas vu le temps passé lol j’ai l’impression que c’était hier lol soyez pas surpris si vous me voyez pas souvent…lol… ma “ronde numérique” = impression 1 jours = 5 jours ; bilan du travail numérique impression 3 mois = 5 fois plus LOL… zut on appelle cela : infobésité ! mdr).

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