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Entretien avec Massimo Marchiori, créateur de Volunia

[Mise à jour – lundi 19 déc.] Selon cette autre interview, les tests publics devraient commencer la semaine prochaine, et le moteur devenir opérationnel dans les…

[Mise à jour – lundi 19 déc.] Selon cette autre interview, les tests publics devraient commencer la semaine prochaine, et le moteur devenir opérationnel dans les 2 ou 3 semaines suivantes. Donc si le timing est respecté, Volunia devrait être lancé dans la deuxième quinzaine de janvier 2012…

* * *

J’interromps un instant mes retours sur LeWeb’11, bien qu’il me reste encore 2 ou 3 billets à écrire sur cette édition exceptionnelle, pour revenir sur le lancement de Volunia, moteur de recherche de prochaine génération, avec cette interview (librement traduite de l’italien) gentiment accordée par son créateur, Massimo Marchiori, que je remercie très sincèrement d’avoir bien voulu répondre à mes dix questions.

1. Dans le premier billet que j’ai publié en français pour annoncer le lancement de Volunia, dans l’ensemble la tonalité des commentaires a été plutôt négative : « que du baratin », « ça sent le buzz à plein nez », « éléments fumeux », « encore un concurrent de Google qui ne va pas faire long feu », jusqu’à « publicité déguisée », etc. Que réponds-tu à ces personnes, et plus généralement à tous ceux qui critiquent d’emblée sans même savoir de quoi ils parlent ni en quoi consiste vraiment Volunia ?

M.M. :

Je répondrais que … ils ont raison ! Ils ont raison parce que Google est un géant, et qu’il est impossible pour toute start-up de penser pouvoir gagner contre Google. L’histoire est d’ailleurs pleine d’exemples d’annonces tonitruantes prévoyant la fin de Google juste pour se faire de la pub et qui ont fini à la trappe. Mais ce qu’on peut lire dans l’actu ou dans les titres est une chose (je ne compte plus combien de fois j’ai lu « l’anti-Google est arrivé », « Volunia veut être le prochain Google killer », etc.), alors que ce que je dis dans la vidéo sur Youtube en est une autre. J’ai justement tenu à la faire moi-même parce que je voulais faire passer un message clair et sans ambiguïté : la vidéo est là pour en témoigner. Je n’ai jamais prétendu que Volunia sera le prochain Google killer, et moi-même je serais vraiment sceptique si j’entendais qui que ce soit faire une telle affirmation : Google est trop énorme. Et du reste, quiconque s’y connaît un peu en moteurs sait que pour faire un outil de recherche qui s’approcherait juste de Google, sans aucune innovation, serait déjà un travail formidable, vu la complexité que représente le déploiement d’un moteur de recherche de taille planétaire. Par conséquent, il n’a jamais été question de « Google killer » : j’ai juste dit que je voulais faire un moteur de recherche d’un autre type, pour permettre aux gens de faire certaines choses mieux, et différemment. Quelque chose de semblable aux futurs moteurs de recherche que nous aurons dans cinq ans. La concurrence directe est impossible : Google, tel que je l’imagine, est comme un boxeur de 200 kilos (vu les ressources dont il dispose), trop puissant dans la lutte, et capable d’anéantir tout autre adversaire pesant bien moins que lui (une start-up, par exemple). Par conséquent, toute compétition directe ne serait que folie, perte de temps et d’énergie. Par contre, si au lieu de l’affronter sur le ring on se la joue à la belote, il se pourrait que le boxeur ne soit plus vraiment à l’aise. C’est donc là où je veux arriver, il faut que l’on fasse du neuf, qu’on arrête avec la pensée unique selon laquelle la seule façon de chercher est celle dictée par les moteurs de recherche d’aujourd’hui, et inventer de nouveaux modèles de recherche.

2. L’un des commentateurs a aussi critiqué le nom-même de Volunia, en affirmant qu’il n’était pas suffisamment simple pour devenir un réflexe pour l’internaute. Peux-tu nous dire comment est né ce nom, pourquoi son choix, quelle est son « étymologie créative » ?

M.M. :

Là encore… je suis assez d’accord avec le commentateur. Et en même temps je suis en désaccord. Il est impossible de trouver le « bon nom », celui qui ira bien à tout le monde. L’étymologie de Volunia dérive des mots « envol » et « lune », pour signifier notre désir de voler haut, d’aspirer à ce quelque chose en plus, plutôt que de se contenter de rester les pieds sur terre, conformes à la normale, ce que nous faisons d’habitude. En outre, le préfixe « vol » est également celui qui a porté chance à l’autre actionnaire (Mariano Pireddu), l’investisseur qui a déjà fondé Voljatel, l’opérateur Télécom slovène. Mais ce n’est certes pas le seul nom que nous avons évalué : chacun a ses goûts et ses couleurs, et ce sont les personnes, les autres, qui comptent plus que nous. Nous avons donc sélectionné une trentaine de noms, dont certains plus courts ou plus « trendy », et nous avons fait faire un sondage comprenant des gens du monde entier, de l’Italie aux États-Unis, de la France au Japon en passant par la Chine, etc., afin de connaître leur opinion. Or au final, c’est Volunia qui l’a emporté : certains n’ont pas aimé, mais pourtant c’est celui-là qui a plu davantage à la majorité des sondés un peu partout dans le monde. Après quoi … plus que le nom, c’est ce que fera le moteur qui importe vraiment. Même « Google », au début, semblait un nom étrange et peu attrayant (autant pour la racine « goo » en anglais, que pour la difficulté de prononciation dans de nombreuses langues), mais ensuite les gens se sont mis à apprécier le moteur, et maintenant ils apprécient aussi le nom.

3. Je comprends bien que tu ne veuilles pas entrer dans les détails pour éviter d’avantager Google ou Microsoft, tes futurs concurrents, mais lorsque tu dis que chercher avec Volunia signifiera faire une « nouvelle expérience » et voir la recherche sous « une autre perspective », que peux-tu dire de plus pour stimuler la curiosité des internautes, les motiver à s’inscrire à la phase de « bêta test », et leur donner envie de considérer ces premiers éléments sous un angle résolument plus positif et optimiste ?

M.M. :

Cela fait des années qu’à toutes les conférences auxquelles je participe j’essaie de dire que la plus grosse erreur qu’ont fait tous ceux qui ont voulu créer un nouveau moteur a été de tenter de refaire un Google amélioré de 10%. C’est aller droit dans le mur. Ce n’est pas comme ça que ça marche, pour innover véritablement il ne faut pas faire dans la continuité, il faut une rupture. Prendre le futur le plus éloigné et tenter de le rapprocher de nous, plutôt que d’essayer d’améliorer le présent. Et c’est exactement ce que j’ai essayé de faire avec Volunia : il n’est pas dit que ça réussisse, mais je suis sûr que dans cinq ans, tous les moteurs de recherche fonctionneront ainsi, et c’est ça qui compte.

4. En tenant d’en savoir plus sur toi et sur le background de la création d’un nouveau moteur, j’ai retrouvé cette interview d’il y a un an, extrêmement intéressante, d’autant plus qu’à mon avis elle pourrait bien dissimuler entre les lignes certains détails sous-jacents à l’approche qu’il y a derrière Volunia. J’en citerai trois :

– 4.1. Lorsque tu dis « Il y a quelqu’un qui tente de faire un moteur de recherche transparent, mais la voie est impraticable », est-ce que tu parlais de Volunia ? Or dans ce cas, « voie impraticable » ferait penser à un échec. Que voulais-tu dire exactement, par cette phrase ?

M.M. :

Non, il n’était pas question de Volunia, mais du fait que les moteurs de recherche, qui sont si importants dans nos sociétés actuelles, sont pratiquement hors de contrôle, alors qu’ils peuvent sérieusement influer sur l’opinion des gens, plus que tout autre média. Ils peuvent décider quoi montrer, et comment le montrer. Ils ont trop de pouvoir. Un moteur de recherche transparent serait un moteur open source, et tous pourraient contrôler son impartialité. Mais il est encore trop tôt pour penser à un moteur open source, car aujourd’hui encore il faudrait beaucoup trop d’argent pour créer un tel moteur et le maintenir opérationnel.

– 4.2. Lorsque tu évoques la préhistoire du Web, qui est passé d’une encyclopédie à une agora sociale, tu ajoutes « c’est sur ce concept-là que nous devons nous concentrer », d’abord en insistant sur l’interaction vocale, et ensuite sur ce que tu appelles : « la mosaïque sociale », en concluant que « l’objectif va au-delà »… Peux-tu nous dire si ce concept de « mosaïque sociale » fait également référence à Volunia ? Et si oui, pourquoi ? Ou pourquoi pas ?

M.M. :

Non, cette mosaïque sociale concerne un autre projet à but non lucratif sur lequel j’ai travaillé avec deux de mes étudiants : j’ai même enregistré le nom de domaine (www.supermosaic.org), et le système est presque prêt, mais son déploiement a été reporté, compte tenu du lancement de Volunia.

– 4.3 Tu attaques l’interview par ces mots : « Je suis un scientifique qui souhaite réaliser quelque chose de beau pour le monde. » En quoi Volunia sera-t-il en mesure de « réaliser quelque chose de beau pour le monde » ?

M.M. :

Réaliser quelque chose de beau pour le monde, c’est faire en sorte de rendre les gens heureux, de réussir à améliorer leur existence, de leur permettre de faire plus simplement ce qu’ils faisaient auparavant avec plus d’efforts, ou encore d’inventer de nouvelles choses qui soient utiles. C’est ainsi que m’est venue l’idée de réaliser Volunia, pour aider les gens. Je pense qu’il s’agit d’une belle chose, qui permettra d’améliorer notre monde : indépendamment de sa réussite ou non, Volunia nous rapprochera de l’avenir, en jetant un gros pavé dans le marché actuel des moteurs de recherche, trop statique à cause des grands monopoles. C’est d’ailleurs ce que j’entends communiquer dans la vidéo avec mon « ça va secouer le Web » (Let’s shake the web).

5. J’ai lu dans un article qui semble en savoir plus que les autres l’hypothèse suivante : « L’hypothèse la plus courue est que Volunia se baserait sur le concept de Web sémantique, autrement connu sous le nom Web 3.0. Volunia s’écarterait donc des logiques traditionnelles utilisées par les moteurs de recherche, qui élaborent les relations entre pages Web en analysant les liens hypertextes qu’elles contiennent. L’approche sémantique, en revanche, prévoit que les connexions entre les textes et les mots vont au-delà des liens contextuels, en se basant principalement sur le sens des documents publiés et sur la capacité à les mettre en relation les uns aux autres moyennant des mots-clés qui taguent le texte écrit. »

Est-ce que d’après toi cette hypothèse s’applique vraiment à Volunia ?

6. Lorsque tu parles d’ « interaction vocale », la chose me fait penser à Siri, une technologie considérée par Eric Schmidt comme une menace pour Google. Or en sachant que derrière Siri il y a Wolfram Alpha, nous sommes vraiment en plein dans le Web sémantique. Mais pas seulement, puisque Trap.it, comme Siri, se base sur un projet Cognitive Assistant that Learns and Organizes de recherche personnalisée via la curation et l’intelligence artificielle. Penses-tu que ces hypothèses peuvent également s’appliquer à Volunia ?

7. Conclusion : en faisant un mix des éléments mentionnés plus haut, je dirais que l’on passe désormais de la recherche à la découverte (from search to discovery), grâce à un cocktail de Web social et de sémantique savamment dosé. Donc, si je devais définir ainsi Volunia, que me dirais-tu : j’ai tout bon, j’ai tout faux, ou entre les deux ?

M.M. :

Pour l’instant, malheureusement, je suis obligé de te répondre « no comment » aux questions 5, 6 et 7, même si, pour un enseignant autant que pour un scientifique, c’est désagréable de ne pas pouvoir fournir d’explications.

8. Y a-t-il quelque chose que tu souhaites ajouter, librement ?

M.M. :

Oui, deux choses : la première, c’est que nous attendons d’atteindre une masse critique, c’est-à-dire d’avoir suffisamment d’utilisateurs partout dans le monde avant de démarrer la phase de test. Il est important que nous puissions nous déployer au niveau mondial, car débuter la bêta cela signifie révéler les nouveautés de Volunia, et il doit donc s’agir d’un test complet. C’est pour cela que nous attendons encore, et pour cela que nous demandons aux gens d’être patients.
La deuxième chose que je voudrais ajouter, c’est que Volunia dispose d’immenses marges d’amélioration : pour l’heure, nous n’avons implémenté qu’une partie de la vision globale que j’ai en tête, car à un certain moment il faudra bien que nous nous lancions publiquement, nos ressources ne sont pas illimitées. La première version de Volunia sera donc porteuse de nouveautés significatives, mais beaucoup d’autres restent encore dans les tuyaux. Tout dépendra de la confiance que nous accorderont les internautes : nous sommes une simple start-up, qui ne dispose pas des énormes ressources financières qu’ont Google, Yahoo ou Microsoft, il s’en faut. Pour autant, si les gens comprennent l’effort que nous faisons, quelle est la vision d’avenir que nous leur proposons, et si Volunia commence à avoir du succès, alors c’est là que le véritable plaisir commencera, et que les internautes du monde entier pourront en bénéficier.

Voilà ! C’est moi qui graisse pour souligner ce qui me semble important, et merci infiniment à Massimo Marchiori.

Cette fois j’espère que les choses seront plus claires que dans mon premier billet, et que vous serez nombreux à avoir l’envie de tester Volunia.

Quoi qu’il en soit, une fois lancé, je suis certain que nous aurons de nombreuses occasions d’y revenir…

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Par : Opera
21 commentaires
21 commentaires
  1. Interview très intéressante ! Même si le + intéressant est ce que Massimo n’a pas pu dire… 😉

    Perso je suis inscrit sur launch.volunia.com, et je pense pas comme la majorité que c’est du buzz. 9 chances sur 10 que ça remporte pas le succès escompté, mais 9 chances sur 10 que suivre l’aventure de Volumia ne peut être que bénéfique pour l’ouverture d’esprit de tout professionnel du web.

  2. Pareil que ce qui a ete dit plus haut
    interview interessante… mais le plus interessant n’a pas ete dit.

    La ou le mec a raison c’est qu’on ecrase pas google sur son propre terrain. ce qui explique pourquoi j’ai du mal a changer de moteur de recherche.
    Je me suis deja inscrit, par curiosite. la l’interview a exacerbe ma curiosite !!!!

    Apres flop ou pas flop ? on vera bien… l’important c’est d’essayer !

  3. D’accord avec FAO, c’est juste du buzz mais ça ne deviendra jamais un réflexe, il existe tellement de moteur de recherche spécialisé comme par exemple Topsy qui a un reel intérêt. Volunia je n’arrive pas du tout à comprendre en plus les articles des blogueurs lui font du tord. Ex: quand je recherche sur Google des informations, je vois: “va t’il détrôner Google ? concurrencer Google ou encore google killer”.
    Les 2 services ne sont pas comparables, google n’est pas uniquement un moteur de recherche…

  4. j’ai trouvé sa réaction très bonne…il a l’air d’avoir la tete sur les epaules et il dit bien qu’il n’est pas la pour révolutionner ni concurrencer google.
    wait&see..

  5. Quelqu’un pourra dire au monsieur qu’utiliser du Comic dans une présentation risque de le rendre ridicule encore plus vite que si il attendait les quelques mois qui mettent tout “nouveau moteur de recherche révolutionnaire” dans la cave des “ils nous ont bien fait rire” ?

  6. Pour moi, le nom est important.
    Qui se souviens de “exalead” ? ou plutôt qui l’utilise encore ?
    Yahoo, Google, Bing … Noms faciles à retenir, même si Yahoo est plus qu’en perte de vitesse.
    Après, pour détrôner Google à un moment ou un autre, il va falloir proposer un minimum de service complémentaire, le moteur de recherche seul n’est plus la panacée.

  7. Oui, les moteurs de recherche sont face à un géant, jusqu’au jour où une faille surgit et où une part e la montagne s’écroule.
    J’avais rencontré un moteur qui restituait sous forme de fleurs à pétales plus ou moins rouges selon la fiabilité des occurrences. Disparu.
    Mais tout ce qui pourra constituer d’autres chemins sur la toile sera le bienvenu. Et si la recherche pouvait être financée aussi à chaque niveau de cet univers, ce serait aussi promesses d’amélioration et donc d’accès au plus grand nombre des informations qu’il recèle.

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