Si vous pensez que Tinder se limite à une simple application de rencontres, vous êtes très loin du compte. De fait, comme la plupart des autres plateformes, ce service donne aussi lieu à des utilisations détournées bien loin de son objectif initial.
Dans un article passionnant publié en 2020, la chercheuse Stefanie Duguay de l’Université Concordia de Montréal revenait déjà sur ces stratégies de communication d’un nouveau genre menées sur Tinder. On voyait au passage comment l’app était utilisée par des partisans du sénateur Bernie Sanders pour soutenir sa candidature à la primaire démocrate.
Des stratégies surveillées de près par Tinder
Loin de s’arrêter à l’Amérique, le phénomène déferle aussi en France où plusieurs exemples récents ont émaillé l’actualité et démontrent à quel point Tinder peut servir de support à des stratégies de marketing politique.
Ainsi, le mouvement Les Jeunes avec Macron a voulu s’offrir un coup de pub pour la Saint-Valentin en annonçant une campagne destinée à lutter contre l’abstention lors de la prochaine élection présidentielle. Ils ont expliqué leur méthode à BFM en précisant vouloir créer des profils Premium sur Tinder, Bumble et Grindr. Ces derniers seraient illustrés d’une affiche arborant le slogan : « Je vote et toi ? Viens matcher avec la démocratie ».
Les @JeunesMacron fêtent la Saint-Valentin !
➡️ « Viens matcher avec la démocratie » : nouveau coup de comm sur les applis de rencontres #Tinder, #Grindr et #Bumble pour inciter les jeunes à s’inscrire sur les listes électorales. Pas de référence à #Macron (@RMCinfo) pic.twitter.com/YpsYD0SnRT
— Paul Barcelonne (@Paul_Barcelonne) February 13, 2022
Problème : la démarche ne plaît pas du tout à Tinder. Le service l’a clairement expliqué à nos confrères que ces comptes seront supprimés. La plateforme précise : « Nous n’autorisons pas les faux profils, y compris ceux créés dans le cadre de campagnes politiques, comme indiqué dans nos standards. Nous prenons le sujet de l’usurpation d’identité et de la création de faux profils très au sérieux et avons une politique de tolérance zéro sur ce type de comportement. »
Face à ce refus catégorique, les Jeunes avec Macron ont finalement obtempéré et modifié leurs plans. Ainsi, ils n’ont finalement pas créé ces faux profils mais demandé à une centaine de leurs militants inscrits sur ces applications de contacter directement des utilisateurs pour leur demander de participer au prochain scrutin.
De leur côté, les membres du mouvement Jeunes & Jadot ont également mené une opération spéciale pour la Saint-Valentin sur les applications de rencontre, rapporte France Inter. Concrètement, une centaine de militants ont été chargés de créer des profils.
💚C'est la Saint-Valentin ! 💚
Cette année on change et on #AdopteUnVert !!@Jeunesetjadot @yjadot pic.twitter.com/Jf3h7Uc68P— Arthur MICHEL (@ArthurMchl) February 14, 2022
Dès qu’ils matchent, ces derniers partagent le programme du candidat écologiste et renvoient leur interlocuteur vers la plateforme adopteunvert.com qui permet de s’inscrire dans le mouvement. Pas sûr que les personnes ciblées apprécient, mais les équipes de Yannick Jadot assument parfaitement ce stratégie de buzz.
« Si tu dates en bas de chez toi… Alors vote en bas de chez toi ! »
Outre ces deux initiatives, Tinder s’est formellement associé avec l’ONG de défense des droits civiques A Voté cette semaine. L’objectif est là encore d’inciter les jeunes à s’inscrire sur les listes électorales à travers un slogan assez surprenant : « Si tu dates en bas de chez toi… Alors vote en bas de chez toi ! ».
Une publicité en quatre volets est donc proposée depuis ce jeudi et jusqu’au 8 avril aux utilisateurs âgés de 18 à 25 ans de l’application. Ils sont redirigés vers le site A Voté qui fournit des conseils sur les démarches essentielles en lien avec le scrutin présidentiel.
Du côté de l’application de rencontre, on assume pleinement cette stratégie qui vise à « aider la jeune génération à reconnaître qu’ensemble, ils ont une voix », selon Ben Puygrenier, le porte-parole de Tinder France. Même son de cloche du côté de Flore Blondel-Goupil et Dorian Dreuil, les co-présidents de l’ONG A Voté. Cités par 20 Minutes, ils expliquent : « Il faut ramener la démocratie au plus près des jeunes, là ou se forgent les opinions et où se font les discussions ».
On peut le déplorer mais il faut en tout cas le constater. Dans une société du zapping permanent, où les géants du web et du divertissement se disputent notre attention, la communication politique semble désormais se limiter à tenter d’attirer brièvement le regard des électeurs grâce à des coups marketing.
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