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Influenceurs, la fête est finie

« Stop ! ». Voilà le message adressé par les autorités à l’encontre des influenceurs qui, pour certains, ont multiplié les pratiques illégales pendant plusieurs années. La fête est finie.

  • L’Assemblée nationale prépare une série de textes visant à encadrer le travail des influenceurs et limiter les abus
  • Des victimes ont déjà porté plainte pour escroquerie et abus de confiance
  • L’Autorité monétaire et financière surveille les influenceurs pratiquant le « copy trading»

Booba n’est pas le seul à partir en croisade contre les influenceurs peu scrupuleux. Démunies, les victimes de leurs pratiques douteuses se regroupent pour lancer des actions en justice. Alertés par leurs élus, les politiques se sont aussi attaqués à ce dossier sensible.

Ce jeudi 9 février 2023, les députés prendront une pause dans le débat sur la réforme des retraites pour discuter de ce sujet. Une première proposition de loi portée par le député du Calvados Arthur Delporte sera examinée de 9h à minuit. L’objectif : définir et encadrer l’activité des influenceurs afin de lutter contre les dérives des pratiques publicitaires de certaines célébrités de ce milieu.

Tous les camps semblent avoir trouvé un consensus sur le sujet. « On est beaucoup à s’être dit qu’il fallait vite faire quelque chose » explique au Monde l’écologiste Aurélien Taché, député du Val-d’Oise, auteur de la première proposition de loi sur ce thème. Un avis partagé par Nadège Abomangoli (France Insoumise-Nupes, qui confirme que les administrés ont « énormément d’attente à ce sujet ».

Ce nouveau texte de loi fait suite à un premier texte adopté en commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale le 1er février 2023. Ce dernier interdit la promotion sur les réseaux sociaux de « produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux et actes de chirurgie » ainsi que de « placements ou investissements financiers ».

Par ailleurs, ce premier texte oblige les influenceurs à signaler systématiquement la promotion de « pronostics sportifs », « jeux d’argents » et « inscriptions à des formations professionnelles » en précisant qu’ils sont « réservés aux personnes majeures ». Le député Arthur Delaporte explique :

En disant ce qu’il faut faire ou ne pas faire, on responsabilise l’ensemble de l’écosystème. Et on protège les premières victimes des influenceurs, qui sont souvent des personnes en situation de précarité.

Plaintes pour escroquerie

Le député du Calvados ne croit pas si bien dire. Après des années de silence, les victimes de ces influenceurs se sont réunies pour les attaquer en justice. Depuis plus de huit mois, le collectif AVI (Aide aux victimes d’influenceurs) travaille sur des dossiers concernant le « copy trading », pratique consistant à expliquer à leurs abonnés qu’ils peuvent devenir riche en copiant des modèles de trading.

Le plus actif sur ce créneau est sans doute Marc Blata, influenceur et ancien-candidat de télé-réalité. Sur ses réseaux, il répète le message « Copier-coller-encaisser » en invitants ses followers à cliquer un lien renvoyant vers un canal Telegram baptisé « Blata Gang ». Là, il communique, avec sa femme Nadé Blata, des ordres d’achats et de ventes selon ce principe du copy trading.

Pour montrer que cela fonctionne, le couple affiche son train de vie à Dubaï et fait miroiter des gains importants grâce à cette pratique. S’il avertit des risques de pertes sur son canal Télégramme, Marc Blata répète tout de même à ses followers de « passer à l’action ».

Au total, 19 600 personnes sont inscrites sur son canal Telegram. Et déjà des victimes ont témoigné de cette escroqueri auprès de France Info. L’une des victimes s’est laissée berner par la certification du compte de l’influenceur et sa participation à l’émission de Cyril Hanouna, des signes de « crédibilité » selon elle. Elle a finalement perdu 1 000 euros en 2021.

Un chauffeur-livreur expliquait à Libération en juillet dernier avoir perdu 2 000 euros en suivant ces conseils. Pire, il y a laissé sa santé. « À sec », il a fini par « manger des pâtes et du riz tous les jours » tant cette pratique l’obsédait. « Je passais jour et nuit devant l’ordinateur pour surveiller les courbes, j’ai perdu du poids, c’était une addiction » témoigne-t-il.

L’un des fondateur du collectif AVI a lui aussi été victime de ces influenceurs. « Je n’avais jamais fait ça, comme la plupart des gens, admet-il. J’ai perdu 1 500 euros entre avril et décembre 2021 ». Pour comprendre ce qui n’a pas marché, il demande un « bilan trading » au couple Blata. Il ne recevra rien et soupçonne alors les influenceurs de ne pas faire de trading mais de gagner de l’argent grâce à l’affiliation. En gros, le couple touche une commission à chaque clic sur le lien d’investissement qu’ils partagent.

Interrogés par Le Parisien, le couple Blata se défait de toute responsabilité. « On est transparents, à aucun moment on a dit à nos abonnés qu’on était traders, explique Nadé Blata. Les personnes qui perdent de l’argent au ‘copy trading’ sont des personnes qui sont allées trop vite et qui ont investi tout leur argent sur un signal ».

Malgré une plainte déposée pour « escroquerie en bande organisée » et « abus de confiance » le 23 janvier 2023, le couple continue d’inciter les internautes à faire du copy trading.

Toutes les autorités sur le pont

Ces pratiques « flirtent avec la légalité » explique le député Arthur Delaporte à France Info. « Il faut être réactif face à des pratiques opaques de finance grise ». C’est pour cette raison que le ministre de l’économie et des finances Bruno Le Maire a ouvert une consultation publique sur ces problématiques.

D’autres députés ont choisi de faire sauter les barrières des partis pour intégrer aussi leurs idées au texte de loi. Trois autres textes ont donc été proposés. Plutôt que de les voter de manière distincte en mars 2023, les députés se disent prêts à les intégrer au texte initial sous forme d’amendements. « C’est un sujet suffisamment apolitique pour qu’on puisse faire l’effort pendant quelques semaines de travailler ensemble », explique Stéphane Vojetta, député Renaissance, porteur d’un texte de loi portant sur ce sujet.

En attendant, l’Autorité des marchés financiers (AMF) s’en mêle. Elle met régulièrement à jour une liste noire des sites non autorisés à proposer des placements financiers à risque. Elle rappelle également que la publicité pour les produits les plus risqués, qu’elle soit directe ou indirecte, est interdite (loi Sapin II du 9 décembre 2016).

« Quand on voit un influenceur recommander un site de trading ou un investissement, il cause poser plusieurs question » avertit Claire Castanet, directrice des relations avec les épargnants et de leur protection à l’AMF. Est-ce qu’il a des compétences avérées en France ? Est-ce un témoignage sincère, désintéressé ou une publicité ? Ce n’est pas toujours précisé clairement, alors que c’est une obligation ».

Dans tous les cas de figure, « il ne faut pas se laisser aveugler par les promesses de gains rapides sans rien faire et sans risque, conclut Claire Castanet. Ça n’existe pas, c’est une illusion ! ».

Toute personne rompue aux produits financiers le dira : plus le rendement est important, plus le risque est élevé. C’est une base de l’investissement et du trading. Par ailleurs, il est toujours bon de rappeler que l’investissement et le trading sont deux choses totalement différentes.

L’investissement est à la porté de toute personne disposant de liquidités et repose sur des rendements à long termes. Le trading consiste à chercher des rendements à court termes, souvent avec des volumes de liquidités importants. On ne s’improvise pas trader, contrairement à ce que veulent faire croire certains influenceurs peu scrupuleux.

Le métier est encadré, requiert des diplômes et, dans certains cas, des certifications pour éviter des expositions trop importantes risquant de mettre des vies en péril. Si vous souhaitez investir, tournez-vous donc vers des professionnels de la finance, pas des influenceurs. Selon la Répression des fraudes“six influenceurs contrôlés sur dix ne respectent pas la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs”. Vous êtes prévenu.

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1 commentaire
1 commentaire
  1. Déjà, les réseaux sociaux sont devenus la plaie de nos sociétés. Vous rajoutez ces décérébrés d’influenceurs au QI de bulot et vous comprenez pourquoi cette société est en perdition constante! !! Tout est tiré vers le bas, au mieux la médiocrité, au pire la nullité…. C’est dire si c’est grave….
    Le mieux ? Interdire ces branleurs d’influenceurs…. Et tant qu’on y est, supprimer tous ces put…. de réseaux sociaux, catalyseurs de ce qu’il y a de pire chez l’homo cretinus …..
    Allez chiche….

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