Passer au contenu

Jeux vidéo et influenceurs : comment Joe Biden tente de séduire la jeunesse

Alors que la campagne présidentielle américaine se déroule en grande partie en ligne, le candidat démocrate cherche des moyens innovants d’atteindre les électeurs.

Il n’y a à priori pas grand-chose en commun entre Joe Biden et l’Ultimate Rap League. C’est pourtant cette ligue de battle rap new-yorkaise que l’équipe de campagne du candidat démocrate a spécialement choisi pour promouvoir la participation à l’élection présidentielle du 3 novembre prochain. Cette initiative s’inscrit dans le cadre d’une stratégie visant à intensifier sa présence digitale.

Tout est en fait parti d’un constat assez net. L’ancien vice-président est en situation défavorable sur Internet face à son rival Donald Trump. Armé de ses millions de followers et de nombreux relais conservateurs, ce dernier dispose en effet d’une force de frappe considérable. Le problème est d’autant plus important cette année où la campagne se déroule en grande partie sur le web. Les équipes numériques de Joe Biden ont donc concocté un plan ambitieux qui s’appuie notamment sur le recrutement d’influenceurs. Les jeux vidéo sont même appelés à la rescousse afin de toucher un public traditionnellement peu enclin au vote.

Quand les influenceurs permettent un ciblage sur-mesure

La campagne de Joe Biden a tout d’abord cherché à se rapprocher de stars très influentes sur les réseaux sociaux. En juin dernier, il a par exemple participé à des directs en compagnie de célébrités telles que la footballeuse Megan Rapinoe, la danseuse Allison Holker, ou encore la chanteuse et animatrice de talk-show Keke Palmer. Cette dernière compte aujourd’hui dix millions de followers sur Instagram, soit le double de l’ancien sénateur. Elle partage surtout des fans en commun avec des vedettes telles que Cardi B, Beyoncé et Kevin Hart.

L’équipe du candidat ne fait d’ailleurs pas mystère de cette stratégie : « Nous considérons qu’il est extrêmement important de quitter notre propre plateforme et d’atteindre les personnes dont nous aurons besoin pour gagner les élections », explique Rob Flaherty, le directeur numérique de la campagne à CNN.

Au cours de ces rencontres diffusées simultanément sur Instagram, Facebook et YouTube, Joe Biden veut donner l’image d’un échange réel et non scénarisé avec son interlocuteur. Pourtant, rien n’est vraiment spontané et l’ensemble est même savamment orchestré. Le plus souvent, on peut le voir assis chez lui avec en fond une plante et une fenêtre. Il faut à tout prix éviter l’impression d’être dans un studio, même si l’on sait que son domicile est équipé à la manière d’un plateau télé.

Le choix des invités ne doit lui aussi clairement rien au hasard. Il permet à Joe Biden de cibler des publics très précis.  Vox cite justement l’exemple d’une rencontre avec Elle Walker, une youtubeuse dont la chaîne WhatsUpMoms compte trois millions d’abonnés. Cette dernière est très suivie par les parents et a échangé avec le candidat sur son programme en matière de garde d’enfants.

Une “dirty campaign” pour décrédibiliser Donald Trump

Le démocrate est aussi aidé dans sa campagne digitale par des comités d’action politique (PAC), des groupes privés dont l’action sert à légitimer ou gêner le parcours d’un homme politique ou d’une cause. NextGen America, l’organisation fondée par le milliardaire Tom Steyer, recherche les influenceurs dans des domaines très divers tels que la beauté, l’humour, ou encore le fitness pour toucher les jeunes électeurs et les inciter à prendre part au vote de novembre.

Enfin, des nano-influenceurs, ces créateurs de contenus qui comptent un très faible nombre de followers, sont aussi employés. De par leur nature très modeste, leur impact est très difficile à mesurer, mais il serait loin d’être négligeable.

Cette stratégie n’est en tout cas pas sans risque. Ainsi, Joe Biden a tenu un live Instagram avec Jerry Harris en juin dernier. Il est très populaire aux USA grâce à son rôle dans la série Netflix Cheer. Ce dernier a toutefois été arrêté en septembre pour une affaire de pédopornographie. Certains républicains ont alors tenté d’exploiter sa courte rencontre avec Joe Biden pour salir l’image du candidat.

Plus récemment, la BBC a enquêté sur plusieurs créateurs de TikTok qui diffusaient des contenus anti-Trump contre rémunération. Problème : il n’était nulle part fait mention de leur collaboration avec la société Bigtent Creative. En creusant un peu, le média britannique n’a pas tardé à comprendre que cette compagnie, initiée par des partisans d’Elizabeth Warren, est financée par des organisations démocrates diverses. Après la diffusion de l’article, de nombreuses vidéos ont été retirées de la plateforme. L’histoire fait désordre et montre que les tactiques de « dirty campaign » ne sont pas l’apanage du camp Trump.

Informations pratiques et selfies : Joe Biden investit Animal Crossing

L’offensive digitale du clan Biden ne s’arrête pas aux réseaux sociaux. Elle cible aussi les jeux vidéo les plus populaires. Le phénomène Fortnite a par exemple donné des idées à ses communicants. Il devient de plus en plus une plateforme qui permet d’organiser des événements virtuels, tels que le concert de Travis Scott qui a attiré 12 millions de spectateurs. Dès lors, Lis Smith, une des conseillères du démocrate, a suggéré en mai dernier qu’il apparaisse sur le jeu, à l’occasion de la convention du parti.

Cette idée ne sera finalement pas suivi d’effets mais elle fait son chemin dans les esprits. Finalement, c’est sur Animal Crossing que Joe Biden a choisi de s’installer. Une île lui est entièrement dédiée et elle accueille aussi son QG virtuel inauguré en grande pompe la semaine dernière. Les joueurs ont l’occasion de visiter les lieux et obtenir des informations sur la campagne. Dépliants, drapeaux arborant la mention « Team Joe » sont de la partie.

L’ensemble, très léger, pourrait prêter à sourire mais la démarche se veut très sérieuse. « Nous continuons à atteindre les électeurs à travers le pays où qu’ils se trouvent – y compris sur Animal Crossing », précise Christian Tom, directeur des partenariats numériques de Joe Biden à The Verge. L’objectif est donc de toucher un public peu politisé mais qui aurait tendance à voter démocrate.

Comme sur un réseau social, l’idée est ainsi d’offrir certaines fonctionnalités aux joueurs afin de les aider à s’organiser et à mobiliser en faveur de Joe Biden. Des informations pratiques sont également fournies, telles que les modalités de participation au scrutin via le vote par courrier ou en personne.

Enfin, il est même possible de croiser l’avatar virtuel de l’ancien vice-président qui se balade un peu partout sur l’île. À défaut de le rencontrer dans le monde réel, il n’est ainsi pas rare de voir les fans prendre des selfies en sa compagnie.

Il est encore trop tôt pour juger de l’effet de ces différentes stratégies numériques. Les conseillers du candidat auront en tout cas tout fait pour toucher un très large public, tout en rajeunissant l’image d’un homme qui fêtera ses 78 ans en novembre prochain.

📍 Pour ne manquer aucune actualité de Presse-citron, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.

Newsletter 🍋

Abonnez-vous, et recevez chaque matin un résumé de l’actu tech

Cliquer pour commenter
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *