En France, au milieu des annĂ©es 1970, le prĂ©sident de la rĂ©publique s’appelle ValĂ©ry Giscard d’Estaing, et de nombreux experts s’interrogent sur l’émergence de la « tĂ©lĂ©informatique ». Les ingĂ©nieurs du CNET (pour Centre national d’Ă©tudes des tĂ©lĂ©communications) s’efforcent alors de peaufiner leur vision de la « tĂ©lĂ©matique », mot-valise composĂ© des termes « tĂ©lĂ©communications » et « informatique ». Des moyens financiers considĂ©rables sont investis dans cette expĂ©rimentation, qui aboutira Ă la crĂ©ation du rĂ©seau Transpac, et quelques annĂ©es plus tard, Ă l’arrivĂ©e chez des millions de Français d’un certain Minitel.
Parce qu’on n’a pas toujours eu un écran 4K devant les yeux, un smartphone OLED HDR dans la main et des manettes sans-fil sur les genoux, PasTech vous propose un petit retour rafraîchissant dans le passé, à la (re)découverte de certains produits emblématiques qui ont fait (ou pas) l’Histoire de la tech. Alors on dit 5, 4, 3, 0, et puis paf, PasTech !
3615 Pressecitron
Au dĂ©but des annĂ©es 1980, ce bon vieux tĂ©lĂ©phone filaire, gĂ©nĂ©ralement installĂ© sur un petit meuble en bois prĂ©vu uniquement Ă cet effet, et recouvert d’un tissu « pour ne pas l’abimer », est prĂ©sent dans de nombreux foyers. Evidemment, pas d’Internet Ă l’époque, pas de rĂ©seau mobile non plus, pas de Facebook ou autre Google, et le Minitel ambitionnait alors de devenir une plateforme incontournable pour s’informer, mais aussi se divertir, tout en s’appuyant sur le rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique existant.
A ce sujet, on se souvient que les sessions tĂ©lĂ©phoniques Ă©taient autrement moins confidentielles qu’aujourd’hui, l’interlocuteur Ă©tant bien souvent assis sur la petite chaise installĂ©e Ă cĂ´tĂ© du combinĂ©, certains papas Ă moustache et Ă pantalon de type “patte d’éph” n’hĂ©sitant pas d’ailleurs Ă porter l’écouteur (situĂ© Ă l’arrière du combinĂ©) Ă leur oreille pour suivre une conversation. Vous vous souvenez ? Bon, et bien c’est dans ce contexte que le Minitel est lancĂ©.
Dans un premier temps, les tests organisĂ©s par la PTT se focalisent sur quelques milliers de foyers seulement, l’un des principaux objectifs du minitel Ă©tant de remplacer ce cher (et Ă©pais) annuaire tĂ©lĂ©phonique. Les plus anciens d’entre vous se remĂ©morent sans doute les indispensables « Pages Jaunes » et « Pages Blanches » de l’Ă©poque, Ă renouveler chaque annĂ©e. C’est en 1982 que le Minitel sera lancĂ© sur le marchĂ©, avec une production alors rĂ©servĂ©e Ă trois constructeurs, Ă savoir : Matra, Philips et Alcatel.
Tous sont en mesure de se connecter au réseau Télétel (il fallait au préalable relier le Minitel à la prise téléphonique murale), avec des services en ligne accessibles depuis le réseau téléphonique, et une commande bien spécifique. L’usage premier du Minitel était le 3611, qui permettait d’accéder à un service d’annuaire téléphonique en ligne…et force est d’admettre qu’il s’agissait là d’une petite révolution !
Un minitel au look étonnant, qui prenait évidemment des formes diverses en fonction du constructeur et de la génération. Les premiers modèles étaient munis d’une prise « T » pour la connexion au réseau téléphonique, et d’un modem V23, permettant des téléchargements de 1 200 bit/s en réception et 75 bit/s en émission. A l’écran, les images s’affichent en mode mosaïque, certains modèles étant dotés d’écran couleur, quand d’autres devaient se contenter de quelques nuances de gris. Certains disposaient d’un clavier fixe, quand d’autres profitaient d’un clavier coulissant, qui venait se glisser sous l’écran lorsque le Minitel était inutilisé, voire d’un clavier pivotant, qui venait recouvrir l’écran.
A noter que les premiers modèles étaient livrés avec un clavier de type alphabétique. Les modèles ultérieurs ont rapidement opté pour des claviers de type « AZERTY », pour le plus grand bonheur des habitués comme des néophytes. La procédure pour se connecter était plutôt simple, puisqu’il fallait allumer son minitel, composer le 3615 (ou autre) sur son téléphone, attendre le bip confirmant la connexion, et presser la touche « Connexion/Fin » de son Minitel avant de raccrocher le combiné.
Rapidement, outre l’annuaire, le service va permettre d’accĂ©der Ă de nombreuses autres fonctionnalitĂ©s, et si certains se remĂ©morent du minitel familial pour l’achat de billets de train, beaucoup sont ceux Ă se rappeler des quelques jeux disponibles depuis la commande 3615, sans oublier les services « roses » tel que l’inoubliable 3615 Ulla.
La révolution Minitel !
Au fur et Ă mesure, le Minitel s’installe dans de très nombreux foyers en France, et voit son panel de fonctionnalitĂ©s exploser. Difficile d’oublier par exemple l’incontournable 3615 DorothĂ©e Ă la fin des annĂ©es 80, permettant d’interagir avec les animateurs de l’émission Club DorothĂ©e, mais aussi de participer Ă des jeux, de classer des chansons ou encore d’influer directement sur la programmation des dessins animĂ©s. C’Ă©tait fou !
Bien sûr, en plus de monopoliser la ligne téléphonique (et donc de couper l’accès au téléphone), l’utilisation du Minitel engendrait un surcoût sur la facture. Si le 3611 était gratuit durant les trois premières minutes (on se souvient tous de nos parents effectuant leurs recherches à toute vitesse pour se déconnecter avant les 180 secondes), ce n’était pas le cas des services de type 3615, facturés parfois jusqu’à 2,30 Francs la minute. Nombreux sont celles et ceux qui ont profité du Minitel pour découvrir les résultats du baccalauréat par exemple, ou encore pour effectuer leur inscription à l’université. Une révolution on vous dit !
3615 Batman, 3615 Astérix, 3615 TF1, 3615 Père Noel, 3615 Pendu, 3615 3 Suisses, 3615 M6… Tout était bon pour faire exploser les factures téléphoniques, sans compter le fait que chaque affichage de page était d’une longueur abominable.
Comme moi, vous avez peut-être participé à des quizz sur votre Minitel, qui permettaient, au terme d’une session d’une vingtaine de minutes (facturée à plus de 2 Francs la minute, soit plus de 40 Francs le quizz), de remporter enfin ce CD deux titres que vous convoitiez tant, d’une valeur… de 30 Francs. C’était ça aussi, la magie du Minitel.
La fin du Minitel, et l’essor d’Internet
Au début de l’année 1986, la France compte un peu moins de 1,5 million de Minitel, installés dans les entreprises, dans les bureaux de Poste et bien sûr dans les foyers. En 1993, ce sont plus de 6,5 millions de Minitel qui sont en circulation en France, avec plus de 25 000 services disponibles.
Evidemment, quelques années plus tard, un certain Internet viendra bouleverser la donne, et ringardiser le principe du Minitel. Pourtant, en 2009, France Télécom enregistrait encore plus d’un million de requêtes sur le 3611. Pas de quoi empêcher le groupe de fermer définitivement le service trois ans plus tard (en juin 2012), à une époque où l’on estimait alors à 600 000 environ le nombre de Minitels encore en circulation dans notre pays.
Depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ , le Minitel est une vĂ©ritable relique du « monde d’avant », et si la majoritĂ© des propriĂ©taires se sont dĂ©barrassĂ©s de leur embarrassant Minitel, nombreux sont ceux Ă rechercher aujourd’hui des modèles en bon Ă©tat, afin, non pas d’accĂ©der au 3615 Ulla, mais plutĂ´t de transformer ces derniers en de petites bornes d’arcade. Et pour briller Ă table ce dimanche, prĂ©cisons que l’appellation « Minitel » est l’abrĂ©viation de “MĂ©dium interactif par numĂ©risation d’information tĂ©lĂ©phonique“.
Et vous, vous aviez quel modèle de Minitel ?
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