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Le PDG de Lynk & Co se livre : secrets, rentabilité, futur de la marque

“Nous serons rentable dans 2 ans”, annonce Alain Visser, le PDG de Lynk & Co.

Dix ans pour atteindre l’équilibre. À Milan en Italie, le PDG de Lynk & Co Alain Visser a confirmé à Presse-citron sont intention de faire de la marque une entreprise profitable “dans moins de deux ans”, de quoi conclure une première décennie de développement pour une voiture (hybride rechargeable) disponible sur abonnement, loin du modèle classique d’un constructeur traditionnel.

Lancé en 2014, le service a dépassé les 170 000 clients et s’efforce aujourd’hui à réduire ses délais de livraison. 25 000 voitures sont actuellement en circulation et l’objectif est d’atteindre 35 000 voitures par tranche de 100 000 clients. Parmi eux, sont comptabilisés les acheteurs (à peine 2 %), les locataires et les sous-locataires. Il manquerait donc à l’appelle plus de 30 000 voitures actuellement pour satisfaire tous les clients. Lire ici notre essai de la Lynk & Co 01.

170 000 clients, vraiment ?

Il est étonnant de voir une part aussi réduite de voitures pour autant de clients. On sait que Lynk & Co préfère insister sur l’autopartage et l’importance d’augmenter le temps d’utilisation d’une voiture plutôt que son nombre sur les routes. Mais le ratio semble tout de même très bas pour des voitures censées tout de même appartenir aux locataires pendant toute la durée de location.

Une part importante de “membres” Lynk & Co (comme la marque aime les appeler) n’ait ouvert un compte que par simple curiosité et pour tester la sous-location proposée par les locataires de voitures. C’est la force de l’abonnement Lynk & Co : pouvoir sous-louer à son tour la voiture lorsque l’on ne l’utilise pas. Un moyen d’abaisser les mensualités de 550 euros (précédemment 500 euros).

Lynk Co essai
La Lynk & Co 01, la première voiture mis à disposition par la marque dans son abonnement mensuel © Presse-citron

Impossible de savoir combien de clients la marque se fixe pour un objectif dans deux ans. Lynk & Co est actuellement présent sur sept marchés et pour 2023, Alain Visser nous confiait simplement : “nous allons certainement doubler nos volumes”. En France, où le marché est encore anecdotique, Lynk & Co a livré 3 000 voitures. Il y aurait actuellement 18 000 membres.

La prochaine étape est de s’installer au Royaume-Uni, “mais pour le moment, nous travaillons sur les marchés que nous avons ouverts. Nous avons beaucoup de travail car 93 % des Européens ne savent pas encore ce qu’est Lynk & Co”, ajoutait-il. Viendra s’ajouter à cela une nouvelle version 100 % électrique de la Lynk & Co 01, son tout premier modèle basé sur le châssis de la Volvo XC40.

Des voitures produites en Chine, revendues en occasion

Les délais d’attente pour la livraison de la Lynk & Co 01 sont particulièrement courts quand l’on compare avec la concurrence. Il ne faut attendre que 2 mois. Et Alain Visser déclarait à Presse-citron que les délais seraient bientôt réduits encore. Pour cela, Lynk & Co s’appuie sur sa maison mère chinoise, le groupe Geely – où elle produit ses voitures. Geely possède aussi Volvo, Polestar ou encore Lotus, tous embarqués dans la transition vers l’électrique.

Pour être rentable d’ici 2 ans, Lynk & Co a imaginé un modèle d’affaires particulièrement nouveau. Il ne s’arrête pas à un simple abonnement à 550 euros par mois. Pour gagner de l’argent, la marque vend ses voitures au bout de 12 mois sur le marché de l’occasion. Aucune offre d’achat n’est proposée aux locataires. Lynk & Co se réserve l’entièreté de la valeur résiduelle de la voiture.

Cette logique débouche sur un contrat gagnant-gagnant selon Alain Visser. “Nos clients de l’abonnement mensuel reçoivent donc une nouvelle voiture après un an. C’est un bel avantage et cela fait partie de notre business model”, nous expliquait-il. Il précisait que les acheteurs du modèle d’occasion pourront toujours profiter des avantages de Lynk & Co en matière d’entretien et d’autopartage.

Lynk and Co
Actuellement 25 000 exemplaires de Lynk & Co 01 circulent en Europe © Presse-citron

Les marketeurs ont remplacé les commerciaux

Atteindre l’équilibre est une chose, mais pour une entreprise de niche comme l’est Lynk & Co aujourd’hui, la question est de savoir si un tel modèle sera effectivement profitable à grande échelle pour Geely. À cela déclarait son PDG : “au long terme, nous considérons que notre rentabilité est au moins aussi grande que celle d’un constructeur traditionnel”. S’il parle de long terme, c’est bien parce qu’il faudra, entre temps, s’ouvrir à de plus gros marchés, à commencer par les États-Unis.

“Nous nous concentrons sur une niche de 10 % mais 10 % d’Européens, c’est déjà pas mal. Ma vision est que d’ici 20 ou 40 ans les gens n’achèteront plus de voiture. Surtout dans les villes. Ils auront une app comme Uber mais sans conducteur. Il n’y aura plus à garer la voiture, simplement commander la voiture quand on la veut. Le service deviendra plus important que le produit”, déclarait Alain Visser lors de notre entretien.

Dans deux ans, l’équilibre ne sera peut-être que très bref, si Lynk & Co souhaite s’investir à l’échelle internationale. Aujourd’hui, ses dépenses se concentrent autour de ses voitures et de l’ouverture de nouveaux showrooms dans les centres-ville – des lieux destinés dans un premier temps à faire connaître le nom de la marque. Après, ils pourront faire office de point de rendez-vous pour des événements et des espaces de coworking ou de détente.

N’évoquez pas ces “clubs” en tant que points de vente. Lynk & Co ne jure que par le numérique pour le processus de vente ou d’abonnement. Dans les équipes de la marque, les marketeurs ont d’ailleurs remplacé les commerciaux. “Ce n’est pas une coïncidence que nos clubs, dans la structure de Lynk & Co, fait partie du marketing et pas de la vente. Plus de 95 % de nos chiffres de ventes sont fait en ligne”, détaillait Alain Visser. Aucune concession n’est prévue.

L’entretien, quant à lui, se fera auprès des garagistes Volvo agréés. Pour ne pas laisser de côté les clients Lynk & Co, “les concessionnaires sont payés basés sur un degré de qualité de travail. Cela comprend le critère du temps d’attente”, ajoutait le PDG à Presse-citron.

Lynk and Co application abonnement
L’application Lynk & Co pour contrôler le service d’auto-partage de la voiture © Presse-citron

À Milan, cocktail et hôtel de luxe

Pour s’offrir une image et un nom, Lynk & Co suit une stratégie semblable à ces entreprises tech qui dépensent des millions d’euros dans le marketing. À Milan, en Italie, à l’occasion de l’ouverture d’un nouveau “club”, la marque y invitait quelques journalistes et un grand nombre d’influenceurs. Cocktail, champagne, hôtel de luxe, le ton est donné par les responsables de la communication venus des quatre coins de l’Europe. La cible est jeune, mais surtout branchée. La cible a du goût. La cible a les moyens, même si les prix semblent particulièrement attractifs chez Lynk & Co.

Les prix continueront d’être assez attractifs, car l’entretien est pris en charge dans les 550 euros par mois, l’assurance aussi, et que la voiture est renouvelée tous les 12 mois. Mais à cela s’ajoute des conditions assez strictes. Outre le fait de ne pas pouvoir fumer à bord ou embarquer un animal sur les sièges passagers, la Lynk & Co 01 devrait être rendue dans un état impeccable au bout des 12 mois sans quoi les clients pourront être facturés. Le nombre de kilomètres mensuels est aussi limité à 1 250 pour un total de 15 000 par an.

Rien ne garantit que les prix des locations ne continueront pas d’augmenter à l’avenir. En un an, ils sont déjà passés de 500 à 550 euros. Les conditions évoluent très vite chez Lynk & Co. Un autre exemple est celui de l’accès Wifi : il est disponible jusqu’au 31 décembre 2022 gratuitement, avant de revenir payant, en début d’année prochaine.

Des voitures, et après ?

Après 35 ans dans l’industrie automobile traditionnelle, chez Ford, General Motors et Volvo, Alain Visser dit être épanoui avec son nouveau projet. Lynk & Co, au départ, était une affaire très personnelle, et c’est en personne qu’il s’est rendu chez Geely pitcher son idée et demander un financement.

“Je suis allé en Chine avec cette idée. Ils m’ont regardé comme si j’étais fou. Mais à la fin, ils m’ont dit ok. Le 1er octobre 2015, j’ai quitté mon travail chez Volvo où je travaillais avec 4000 employés. Je suis passé chez Lynk & Co, je me suis retrouvé seul. Je n’avais pas de bureaux, je n’avais pas d’employés. Maintenant, nous sommes entre 800 et 900 personnes. C’est la première fois dans ma carrière où je fais ce que je crois être bon”, racontait-il.

Depuis, il affirme dépasser de loin ses objectifs initiaux. Et que d’un ovni, il a reçu aux yeux de la maison mère “un rôle très stratégique […] à la pointe de l’expérimentation”.

Or l’automobile et la proximité avec Volvo ne sont pas une fin en soi. De nouveaux châssis, d’autres constructeurs ? “Absolument”, déclarait-il. Des scooters ? Des vélos ? “C’est possible, oui”, finissait-il par dire. Le reste de la marge, peut-être, passera par la vente de produits dérivés dans les showrooms. À moins que l’espace de coworking ne soit plus lucratif ?

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