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Skoda tourne une page de 30 ans. La suite tient en 5 défis

Dans son fief historique, l’ensemble de la direction de Skoda s’est retrouvée pour évoquer la suite. Une stratégie pleine de compromis l’attend.

Comment changer tout en gardant le cap ? Dans la famille du groupe Volkswagen, il y a de ces constructeurs qui vont devoir passer par une seconde crise d’adolescence. Comme Seat avec Cupra, Skoda est de la partie. Les deux marques les plus accessibles du groupe ont beau partager les mêmes pièces que Audi et Volkswagen, leur insertion dans le Nouveau Monde de la mobilité électrique est plus difficile : il leur faut rajeunir leur image.

Skoda le fera différemment que Seat avec Cupra, alors qu’elle continuera d’exercer sous le même nom. Mais ses 30 dernières années sous l’ère Volkswagen sont révolues et il est temps de changer de logo. Adieu la célèbre flèche, place à quelque chose de plus moderne et tendance dans le milieu automobile, qui s’accompagnera d’un style aperçu sur le concept Vision 7S l’année dernière.

Un élément parmi tant d’autres dans une nouvelle feuille de route que l’on peut résumer en 5 points :

  • Rajeunir la marque sans changer son ADN
  • Sortir 4 nouveaux modèles électriques avec peu de moyens
  • Restructurer Mladá Boleslav
  • Réinventer le moteur thermique (et continuer à en produire)
  • Gérer l’expansion internationale dans un monde instable

C’est tout du moins ce qu’il en ressort de l’intervention de Skoda ce soir, dans son fief de Mladá Boleslav en République tchèque. L’ensemble des membres de sa direction organisait un événement international histoire de revenir sur chaque point, en échangeant quelques discours marketing contre une visite des chaînes d’assemblage aux journalistes présents sur place.

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Plutôt que des concepts, Skoda n’a présenté que des “sculptures” des futurs modèles électriques © Presse-citron

4 nouveaux modèles

L’essentiel de la présentation de ce mardi 25 avril tenait dans la présentation (timide) des quatre futurs modèles électriques prévus dans le calendrier. Au lieu de concepts ou de premiers visuels, Skoda a montré quatre “sculptures” se concentrent sur les dimensions des modèles plutôt que sur leurs appendices. Le premier modèle est pourtant prévu pour l’année prochaine.

Il s’agira du nouvel Elroq, le successeur 100 % électrique de l’actuel Karoq. Long de 4,50 mètres, il représente le volet dit “Compact”, un SUV 5 places, intégré entre un modèle “Small” et le futur SUV 7 places dérivé du concept Vision 7S du volet “Space” (long de 4,90 mètres). Le dernier modèle prévu est le prochain break électrique, naturellement intégré dans un volet baptisé “Combi”, avec une longueur de 4,70 mètres.

En reste, la seule annonce additionnelle concerne l’objectif tarifaire du modèle “Small”. Cette entrée de gamme qui empruntera encore les lignes d’un crossover vise les 25 000 euros, pour une commercialisation en 2025 et une longueur de 4,10 mètres. Sa production n’est pas prévue en République tchèque, mais en Espagne.

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Le futur modèle le plus abordable de Skoda avoisinera 25 000 euros © Presse-citron

Changer les habits, pas l’ADN

Le nouveau logo de Skoda a déjà été annoncé, mais nous ne connaissions pas le détail de son calendrier jusqu’à présent. À l’automne, les différents restylages prévus sur la gamme actuelle transformeront leur actuel logo 3D en format 2D, plus dans l’air du temps. Ensuite, le passage au nouveau logo et à la nouvelle signature lumineuse arrivera l’année prochaine (sur le nouvel Elroq).

Le changement a beau paraître simple, il s’avère plutôt résulter d’une opération chirurgicale pour les responsables du marketing de Skoda. Et sa présentation expliquée avec des pincettes. Skoda doit rajeunir, mais son objectif et sa cible de clients ne doivent pas changer. Qui est-elle ? Les familles, indéniablement.

Rien de nouveau donc, sauf que… Le slogan “Simply Clever” des publicités disparaît, mais “pas dans notre coeur, il est juste un slogan que nous gardons pour nous”, expliquait la responsable de la communication marketing Meredith Kelly avant d’ajouter : “nous sommes une marque plus accessible dans le groupe, mais cela ne veut pas dire que nous sommes cheap pour autant”. Ce mardi 25 avril, la nouvelle identité de la marque a préféré opter pour un “Let’s Explore” plus frais et enthousiaste, comme nouveau slogan.

Pourquoi devoir autant se justifier, alors que l’ensemble de l’industrie automobile suit la même logique ? Car le groupe Volkswagen doit pouvoir différencier ses marques, mais que l’essor de la voiture électrique et les nouveaux modèles de production ne permettent plus de séparer des entités d’un même groupe sur le plan technique. Alors aujourd’hui, tout passe par la communication et le marketing, comme pour les marques de smartphones.

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Meredith Kelly, chargée d’expliquer la nouvelle direction marketing de Skoda, mardi 25 avril 2023 à Mladá Boleslav © Presse-citron

Rester le garant du moteur essence

Loin de Mladá Boleslav, en Allemagne, le siège du groupe Volkswagen a rendu son verdict sur le futur de la production des moteurs thermiques. Avec l’arrivée de la nouvelle norme européenne Euro 7, il sera une nouvelle fois plus difficile de produire des moteurs essence homologués et Volkswagen vient de confier la tâche à Skoda. Les lignes de production ont quitté le fief pour une autre usine dans le pays, mais serviront désormais à l’ensemble des autres constructeurs.

Skoda sera donc désormais le garant de la production de moteurs à essence chez Volkswagen, mais aussi de son développement. La marque cherche à embaucher 150 nouveaux ingénieurs pour répondre à la tâche de R&D. Ces moteurs seront bien évidemment connectés au système hybride des différents constructeurs, mais évolueront encore pendant de longues années. Skoda vise une part de 70 % de ventes en faveur de l’électrique d’ici 2030.

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Dans son fief de Mladá Boleslav, Skoda ouvre les portes de ses chaînes d’assemblage à un groupe de journalistes © Presse-citron

Restructurer Mladá Boleslav

Choisir d’annoncer la nouvelle feuille de route dans son fief relève de la réassurance pour Skoda, martyrisée par une expansion internationale qui lui fait ouvrir des usines en Inde et qui doit aussi faire face au coût du travail et de l’évolution des métiers. Il y a un mois, c’est ici à Mladá Boleslav que sa direction tirait le signal d’alarme : jusqu’à 3000 emplois risquent d’être supprimés rien que par l’approche de la future norme Euro 7, sur les 28 000 employés Skoda du site actuel.

L’Europe, qui travaille toujours sur ses conditions d’application, doit faire face à une résistance de certains constructeurs aux salariés formés et employés pour la production plus exigeante en main d’oeuvre que représentent les voitures dotées d’un moteur thermique. L’arrivée des modèles électriques rime aussi avec celle de nouvelles professions sur lesquelles les employés ne sont pas qualifiés.

En visite des chaînes d’assemblage, on remarque facilement la présence des équipes essentiellement formées aux modèles thermiques laissant passer des exemplaires d’Octavia hybride, et d’autres équipes faisant l’inverse avec les modèles 100 % thermiques. Cette disposition finira par disparaître et une seule et même équipe sera chargée de l’ensemble de l’assemblage, avec moins de personnel au final.

Mladá Boleslav peut tout de même compter sur la prise en charge de la production de batteries – déjà plus de 500 000 produites aujourd’hui – qui reste une activité de ce monde de demain réalisée “à domicile”. En revanche, ces batteries seront demain envoyées dans d’autres usines pour l’assemblage final, comme en Espagne où le modèle d’entrée de gamme électrique est affecté – laissant un large pan de la production de la marque en dehors de République tchèque.

Si l’on prend Peugeot comme exemple (qui possède des usines en Slovaquie et en Espagne), les embauches de ces années futures pour Skoda en République tchèque devraient se tourner vers un nouveau métier : celui de testeur de batterie. La manipulation prend du temps, la vérification d’une batterie de 50 kWh nécessitant une heure, et celle d’une batterie plus puissante (75 kWh) jusqu’à 90 minutes.

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Les batteries de l’Enyaq iV, ici à l’usine de Mladá Boleslav en République tchèque © Presse-citron

Gérer l’expansion internationale dans un monde instable

Face à “l’immense potentiel de croissance de ces marchés”, l’Inde et le Vietnam voient arriver un Skoda profondément concentré sur de nouvelles régions du globe. Klaus Zellmer, le nouveau patron de Skoda qui n’avait pas une minute à nous accorder pour une interview, a remplacé Thomas Schäfer à la tête de Skoda il y a bientôt un an pour ce chantier.

Ces nouveaux marchés sont aussi l’occasion de nouvelles usines de production, menaçant celles en Chine. En décembre 2022 à Berlin, le nouveau patron Klaus Zellmer répondait dans une interview à l’hebdomadaire Automobilwoche qu’il réfléchissait à se retirer du pays où une coentreprise avec un partenaire chinois s’occupe aujourd’hui du marché.

“Si nous voulons concentrer nos efforts, cela vaut la peine d’étudier tous les scénarios, puis de décider”, annonçait-il, en planifiant une réponse définitive cette année. Celle-ci n’a pas encore été prise. En cause certainement : BMW, qui est arrivé à négocier avec les autorités pour posséder l’intégralité des parts du site de production.

Pour les autres constructeurs, comme Skoda ou Tesla, l’obligation de devoir passer par une coentreprise grignote une part importante des recettes, rien de très durable pour rentabiliser les milliards investis dans l’expansion mondiale. L’investissement dans l’électromobilité étant déjà chiffrée à 5,6 milliards d’euros jusqu’à 2027 selon les derniers chiffres de Skoda.

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