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Pourquoi la France ne peut pas “rater le virage” des technologies quantiques

1,8 milliard d’euros vont être injectés ces cinq prochaines années, pour faire passer la recherche en technologies quantiques de 60 à 200 millions € par an.

Le « plan quantique » vient d’être présenté par Emmanuel Macron à Saclay (Essone). Le troisième institut de recherche français, inauguré en novembre 2019, a accueilli le président de la République venu pour rehausser le budget décerné à l’enveloppe d’investissement pour les technologies quantiques. Objectif : préparer l’avenir informatique, des appareils informatiques et de la sécurité numérique, avec un budget annuel passant de 60 à 200 millions d’euros.

« Cette technologie est une véritable rupture. Ses applications peuvent révolutionner des branches industrielles comme la chimie, la pharmacologie, l’énergie, la métallurgie, l’aéronautique ou les communications » expliquait le PDG de Safran, dans un précédent rapport de la députée Paula Forteza. En plus d’être une « rupture » pour les avancées technologiques, son développement est vu comme une véritable bouée de secours pour retrouver la souveraineté numérique.

Il suffit de regarder chez nos pays voisins, pour comprendre la motivation française. La Chine, positionnée en leader mondial du secteur, avait débloqué de 10 milliards de dollars pour ses laboratoires. États-Unis, Allemagne, leurs plus petites enveloppes dépassent tout de même la nôtre, avec respectivement 1,2 milliard entre 2018 et 2023, et 2 milliards entre 2020 et 2021. Il ne faudrait « pas rater ce virage » écrivait la députée de La République en Marche qui a mené la rédaction du rapport du 9 janvier dernier aux côtés du directeur de recherche au CNRS, Iordanis Kerenidis.

Pour espérer avoir « une place dans la course », comme le motivait la députée, la France compte donc sur trois instituts : à Paris, Grenoble et Saclay. La bagatelle de 1,8 milliard d’euros mis sur la table provient de l’État (1,05 milliard d’euros), du crédit européen (200 millions) ainsi que du secteur privé (550 millions). De quoi poursuivre des recherches que la France pouvait alors se targuer d’avoir été aux avant-postes, depuis les années 1980.

Les technologies quantiques

Entre l’incompréhension aux yeux du grand public et la recherche en la matière qui n’est pas récente, difficile de comprendre en quoi les technologies quantiques ont cette nature de “rupture” aujourd’hui. « Il s’agit d’améliorer l’existant et de s’appuyer sur nos forces » rappelait le directeur de recherche du CNRS dans son rapport.

En se reposant sur les propriétés atomiques de la matière – de l’infiniment petit et des délirantes loi de la physique quantique – de nombreuses découvertes ont déjà eu lieu et ont permis la mise au point de technologies qui font l’internet et le numérique d’aujourd’hui, à l’image des processeurs et des technologies sensorielles. Mais demain, les technologies quantiques chercheront à pousser de façon bien plus lointaine leurs recherches fondamentales.

D’un point de vue des ordinateurs tout d’abord. Ce sont eux qui susciteront le plus d’intérêt dans la recherche, et particulièrement en médecine. Afin de proposer des machines bien plus puissantes que celles reposant sur nos technologies actuelles. Dans l’informatique quantique, par exemple, les bits seront remplacés par les qubits, et les signaux électroniques « traditionnels » par des signaux quantiques, infiniment plus petits. Ils permettent un transport d’une information bien plus riche et rapide, mais se limitent encore à distances réduites et par câble de fibre optique, ce que les scientifiques veulent aujourd’hui dépasser.

Au sujet de la communication justement, les moyens et les améliorations attendues sont considérables. Il en est une question de souveraineté, tant les méthodes de communication seront bien plus sécurisées comparé aux méthodes de chiffrement actuelles, où un tiers malveillant peut très bien décrypter une clé sans que l’expéditeur et le récepteur d’un message n’en soient informés. À travers les signaux quantiques et l’information par qubit, la technologie appelée « QKD » (pour « quantum key distribution ») ne permettrait pas à quiconque de récupérer une information sans que cela ne soit détecté instantanément, grâce à des lois physiques toujours.

Retenir les cerveaux

Il est donc compréhensible que la France ne souhaite pas rater ce virage des technologies quantiques, qui, après avoir permis des découvertes qui font l’industrie technologique d’aujourd’hui, pourraient débloquer bien plus d’avancées lors de cette nouvelle décennie. Elles permettront aussi de corriger des problèmes avec nos systèmes actuels, notamment en matière de cybersécurité pour les services médicaux, politiques et financiers.

Les fonds débloqués iront bien évidemment dans le but d’accélérer les recherches. Mais en vue des moyens des autres pays, le but recherché sera également d’éviter la fuite des cerveaux. En parallèle de la formation de 150 jeunes chaque année entièrement financée, des contrats post-doctoraux seront attribués, et la France ne se refuse pas de choisir « une dizaine de chercheurs que l’on pourrait faire venir par an », rapportait un conseil de l’Élysée à AFP.

Enfin, en cas de découverte scientifique majeure, la France se dit prête à augmenter les budgets présentés ce jeudi. Un plan quantique potentiellement bien plus important donc, et un plan résolument national, malgré les fonds du crédit européen.

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