L’incident s’est produit à l’aéroport de Los Angeles il y a quelques jours. À bord d’un Airbus A380, le plus gros avion commercial au monde, les passagers de la compagnie Asiana Airlines se rappelleront de leur décollage mouvementé. Alors que toutes les conditions étaient d’apparence réunies pour que l’avion puisse décoller en toute sécurité, et que l’appareil n’avait aucun problème technique, l’improbable s’est produit. Un phénomène rare et particulièrement dangereux.
La scène a été filmée par la chaîne YouTube LA Flights, qui diffuse chaque jour des vidéos en direct depuis l’aéroport international de Los Angeles aux États-Unis. Quelques secondes après avoir décollé, l’Airbus A380 s’est incliné sur son côté gauche, puis sur son côté droit, de façon bien anormale et loin d’être orchestrée par les pilotes. Au même moment, l’avion traversait un phénomène connu sous le nom anglais de “wake turbulence”, que l’on traduit en français par “turbulence de sillage”.
Pencher de façon aussi extrême ne se voit généralement qu’en démonstration aérienne, ou en cas de situation d’urgence. Surtout pas lors d’un décollage. Malheureusement, en présence de turbulence de sillage, c’est pourtant bien ce qui se produit sur les avions et qui — dans le pire des cas — entraîne leur crash. La perturbation dans l’atmosphère peut être si forte qu’elle peut y compris toucher des gros porteurs comme cet A380. Pour le rencontrer, deux grandes conditions doivent être réunies.
- un vent adéquat
- deux décollages suffisamment rapprochés
Departing Asiana A380 encounters wake turbulence from previous Korean A380 departure at KLAX. Winds 240 at 9 from RWY 24L. Captured live from LA Flights. pic.twitter.com/bqR0ivOy3p
— Justin Haase (@JustinHaase18) April 5, 2023
Le piège des turbulences de sillage
Les turbulences de sillage se définissent par la présence de perturbations dans l’air générée par un avion. Elles deviennent dangereuses lorsqu’un autre aéronef passe à l’intérieur de celles-ci. Elles peuvent être générées par les jetwash (perturbations de l’air par les réacteurs) et les wingtip vortices (perturbations de l’air par les ailes). C’est à cause de ce deuxième cas de figure que l’A380 en vidéo ci-dessus a pivoté de cette façon après son décollage.
Il faut impérativement attendre un minimum de temps avant que le phénomène ne soit entièrement dissipé et qu’un autre avion puisse passer dans le sillage sans problème. Avant, le mouvement de l’air poursuit son effet rotatif et tout avion qui entre à l’intérieur de ce vortex aura bien du mal à braquer dans l’autre sens pour garder son assiette (ses ailes parallèles à l’horizon). Espacer les avions au décollage est donc primordial, et le temps d’attente fluctue en fonction de la taille des avions (plus celui-ci est gros, plus le temps d’attente doit être important).
À la tour de contrôle de l’aéroport de Los Angeles, les délais ont bien été respectés, mais le phénomène peut être fortement accentué si l’avion qui le précède est particulièrement gros et que le vent ne permet pas aux vortex de s’écarter de l’axe des pistes. Avant l’A380 d’Asiana Airline, un autre A380 a décollé, cette fois-ci de la compagnie Korean Air. Les A380 comme les Boeing 747 sont inscrits dans une catégorie à part et il faut donc davantage de temps encore entre leur décollage et les suivants.
Des vidéos de vols où les avions finissaient par se crasher sur le sol sont nombreuses. Le phénomène est aujourd’hui connu de tous les professionnels de l’aéronautique et les contrôleurs aériens le prennent en considération. Mais comme ici à Los Angeles, on comprend qu’il est toujours probable que les conditions jouent en la défaveur des pilotes et que par nécessité de trafic, il ne soit pas possible d’attendre davantage de temps dans certains aéroports pour faire en sorte d’esquiver tout danger.
Certains s’en plaignent et souhaitent alerter sur la situation. “Il y a une raison pour laquelle l’espacement est censé être de 180 secondes complètes après le départ du gros avion précédent. L’ATC a largement ignoré cette règle pendant des années pour augmenter la capacité des aéroports très fréquentés”, écrivait un internaute sur Twitter.
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